Conseil de métropole du 8 Juillet 2019

Commerçants, violences, ordre public et gilets jaunes Enregistrer au format PDF

2019-3676 - Plan d’actions en faveur de la redynamisation commerciale de la Presqu’île de Lyon suite aux impacts du mouvement des Gilets jaunes
Lundi 8 juillet 2019

Cette délibération appelle un débat bien au-delà de son objet même, nous la voterons, même si nous savons tous que l’avenir de la presqu’ile est soumis à défis qui dépassent de très loin l’impact du mouvement social de cet hiver.

Il s’agit donc d’aider à l’animation commerciale de la presqu’ile, affaiblie par des manifestations à répétition. Mais il faut répondre à deux questions pour comprendre ce qui s’est passé, car qui peut prédire que cette situation est derrière nous ?

D’abord pourquoi une telle répétition de manifestations qu’on ne compte plus ? Et ensuite, pourquoi ces formes de manifestations éclatées, non déclarées, et pourquoi ces violences, qui mêlent colères bien réelles de manifestants, affrontements entre groupes organisés et police, et vandalisme opportuniste ?

A la première question, nous connaissons tous la réponse et permettez-moi de citer le voeu que nous vous avions proposé cet automne De tout le pays monte la colère populaire contre l’injustice sociale et fiscale. Des millions de femmes et d’hommes constatent qu’ils ne s’en sortent plus et n’acceptent plus de payer de plus en plus cher pour survivre avec des salaires de misère, des pensions sans cesse rognées, des allocations sacrifiées sur l’autel de l’austérité.

Or, depuis le 17 novembre 2018, l’essence est à son plus haut, l’électricité a augmenté de plus de 7% en deux fois, augmentation injuste évidemment, mais aussi totalement injustifiée puisqu’on nous a vendu la concurrence pour faire baisser les tarifs, et qu’il faut les augmenter pour sauver cette concurrence.

Et bien évidemment, les fractures urbaines et territoriales, qui révèlent des fractures sociales, ne se sont en rien réduites, au contraire ! Les mêmes logiques sont à l’œuvre, celles dont vous vous félicitez en applaudissant à l’attractivité métropolitaine.

Autrement dit, les forces réelles qui alimentent les colères révélées avec le mouvement des gilets jaunes sont toujours à l’œuvre. Marx montre que le capitalisme fabrique lui-même ses propres fossoyeurs. Mais il sait parfaitement les diviser, les réprimer ou les pervertir, si ces acteurs eux-mêmes ne se donnent pas leur propre organisation, leur propre cohérence au service d’un véritable changement de société.

C’est la deuxième question qui nous préoccupe, une fois établie que ce mouvement social aura des suites, demain ou après-demain. Pourquoi ces formes de manifestations, pourquoi ces violences ?

Nous payons tous sur ce point la longue histoire sociale de notre pays qui avait construit des repères, l’espoir d’une autre société, de « changer la vie » disait Mitterrand comme Hollande nous dira « contre la finance ». Les conflits sociaux étaient tous inscrits dans un débat politique structuré pour ou contre le projet d’une gauche apparemment unie.

Le choix tactique de faire entrer le Front national dans ce jeu politique a eu de terribles conséquences, mais surtout, l’échec historique des promesses de la gauche qui se lit dans les statistiques comme la part des salaires dans le PIB, qui progresse jusqu’en 1981 pour baisser de manière continue ensuite jusqu’en 2000…

Et depuis, toutes les forces politiques, et malheureusement pour lui, le PCF y a été sensible, tentent de résoudre ce défi par des artifices médiatiques, le renouvellement des sigles, des personnes, jusqu’à ce « nouveau monde » qui voulait tout changer pour que rien ne change comme on dit.

Pourquoi voulez-vous que notre peuple invente d’un seul coup une réponse en terme d’organisation ? Non, il a fallu un siècle pour organiser le syndicalisme que nous connaissons !

Il est donc normal qu’un mouvement hétéroclite, marqué par la fracture politique et institutionnelle, soit fragile, incertain, manipulable, et les manipulations n’ont pas manqué. Mais cette situation révèle votre faiblesse historique ! celle de toutes les forces gouvernementales, de gauche, de droite et des deux, qui sont aujourd’hui incapables d’organiser réellement de larges parties du peuple, en dehors des excitations médiatique préélectorales où l’argent coule à flot !

Dans un tel contexte, pour comprendre l’origine des violences, il faut un réflexe policier si j’ose dire, « à qui profite le crime ? ». Il suffit de réécouter les déclarations gouvernementales dès les premiers jours de manifestations pour comprendre que l’affolement, l’inquiétude ont vite conduit à instrumentaliser la violence en espérant casser la forte solidarité qui s’exprimait pour les gilets jaunes.

Je peux témoigner de différentes formes de violence rencontrées dans les manifestations :

  • Celle de femmes gilets jaunes par exemple, violence verbale insultant la police et exprimant une véritable rage sociale. Elles manifestaient pour la première fois sans comprendre pourquoi elles ne pouvaient pas être entendues, reconnues, reçues… Dans ces premiers jours, il était essentiel d’ouvrir largement les portes du dialogue, il fallait le geste politique pour dire « on s’est peut-être trompé et nous pouvons vous entendre et changer certains points de notre politique ». Mais tout l’armement institutionnel a été mobilisé pour au contraire discréditer une parole qui se cherchait, la diviser et créer les conditions de ce qui est arrivé, un grand débat show médiatique du président dont la conclusion était connue avant même d’avoir commencé « on continue ! »
  • C’est l’essentiel du problème de ces violences, le reste n’est que péripétie, et notamment le jeu des groupes violents et de la police, un terrible jeu gagnant gagnant puisque les groupes violents cherchent à créer des points d’affrontements dans la manifestation et que contrairement à tout ce qui nous est dit, la police a toujours eu comme consigne de traiter les groupes violents au milieu des manifestants…
  • Sans parler des bavures que même un ancien premier ministre de l’intérieur évoque, oubliant bien entendu celles du 1er mai 2018 dont je peux témoigner personnellement.

C’est pourquoi nous voulons une nouvelle fois affirmer ici notre condamnation des politiques gouvernementales sur le fonds, leur iniquité sociale, comme sur la forme un autoritarisme de plus en plus brutal, et notre solidarité avec les colères sociales, notre appel à tous à s’organiser, à refuser les violences et l’affrontement stérile avec les forces de police et à toujours rechercher la seule force qui fait réellement peur aux pouvoirs, celle du plus grand nombre.

Et si nous votons cette délibération d’aide aux commerçants, nous n’oublions pas les centaines de blessés et de mutilés qui n’auront pas droit eux, à votre attention.

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