Reconstruction du lycée Jacques Brel

Un lycée contre le guetto et la ségrégation sociale ! Enregistrer au format PDF

Conseil Municipal de Vénissieux, le 26 Juin 2006
Lundi 26 juin 2006 — Dernier ajout samedi 26 avril 2014

Mesdames et messieurs,

Je veux intervenir en tant qu’élu au nom du groupe communiste avec la volonté de rassembler les forces progressistes de la ville, de ses quartiers, des villes du Sud de Lyon pour la reconstruction de la cité scolaire.

Mais aussi et avec passion en tant que parent d’élève du lycée Jacques Brel, et permettez-moi de commencer par ce témoignage personnel comme parent d’élève de Vénissieux qui a vu trois enfants suivre toute leur scolarité dans les écoles publiques de leur quartier, dans le collège de leur quartier, dans le lycée de leur ville, et dont je suis sûr que la petite sœur connaitra elle aussi sous une forme ou une autre la réussite a laquelle a droit chaque jeune de notre ville. Je sais bien que cette réussite est très dépendante des conditions sociales, mais nous savons tous quand nous fêtons les jeunes méritants de la ville que des centaines de jeunes Vénissians de toutes origines et conditions trouvent dans leur histoire vénissiane les voies de leur réalisation sociale et personnelle. Cela n’enlève pas les difficultés, mais cela rappelle que des efforts, des engagements, des projets incroyables se font dans cette ville, portés par des enseignants, des parents, des jeunes, les services municipaux et des partenaires et qu’ils montrent qu’il est possible de combattre le repli sur soi, l’enfermement dans la peur et l’échec, la stigmatisation sociale.

Je sais que cela ne va pas nécessairement de soi. Quand je suis arrivé aux Minguettes, une enseignante militante qui avait consacré sa vie professionnelle a cette bataille pour le droit a l’éducation m’avait dit « ne mets pas ton enfant dans cette école ». Franchement, cela m’a fait hésiter bien sûr, mais je veux dire aux parents de Vénissieux, Feyzin, Corbas ou Saint-Symphorien d’ozon, qu’aucun enfant n’est condamné ou même limité dans une école de quartiers populaires, au contraire, il y trouve le plus souvent des équipes pédagogiques mobilisées, et a Vénissieux en tout cas, des moyens et des projets significatifs de la municipalité.

Je voudrais aussi témoigner cette fois en tant qu’enseignant dans une grande école de Lyon, l’INSA que rejoignent parfois quelques jeunes Vénissians de toutes origines. Quand ils découvrent dans cette école un enseignant habitant le quartier de la pyramide aux minguettes, je peux vous dire qu’ils sont contents, et qu’ils ne donnent vraiment pas le sentiment d’avoir fui leur quartier. Au contraire, ils gardent le plus souvent en eux le besoin de permettre à tous de réussir, d’être utile socialement, de ne pas céder a l’individualisme.

Et quand le directeur de cette école dit a propos des partenariats de grandes écoles avec les ZEP « il faut aider les élèves doués a sortir de leur milieu », je suis convaincu qu’il se trompe, et que ce n’est pas en fuyant leur origine que ces jeunes réussissent, mais c’est au contraire en puisant dans la solidarité, la ténacité, l’engagement qu’on y trouve.

C’est d’ailleurs ce que dit le directeur de HEC Paris qui témoigne que pour lui, l’intérêt de la « mixité sociale », c’est aussi de permettre aux jeunes de la bourgeoisie d’avoir un peu plus les pieds sur terre pour être capable d’assumer ensuite les responsabilités qu’ils auront.

C’est aussi pour toutes ces raisons personnelles, que je veux au nom des élus communistes et républicains lancer un appel a la mobilisation des parents d’élèves, des enseignants du lycée, des collèges, des habitants des villes concernées pour ne pas se tromper de combat et se retrouver enfin pour défendre la place et les moyens d’un grand lycée porte sud de l’agglomération, reconstruisant la confiance des familles, redonnant une perspective de réussite aux jeunes, diversifiant ses filières en lien avec l’activité économique de la région, s’appuyant sur la richesse de la population de nos villes, notamment sur la richesse de ses relations internationales pour être non pas un lycée de quartier, mais un lycée largement connu et recherché. Certains me diront que cela est un rêve quand tant de problèmes concrets ne sont pas résolus. Mais pouvons nous accepter de renoncer ?

Lors du conseil municipal qui a découvert l’opposition de certains enseignants et du groupe socialiste a la reconstruction du lycée Jacques Brel sur le site de démocratie, j’avais réagi avec passion, pas tant sur la localisation précise du projet qui à l’évidence dépend d’abord des impératifs techniques et de coûts des travaux, mais surtout contre les idées qui apparaissaient dans le débat et qui me semblait mettre en cause frontalement les efforts difficiles que la majorité municipale réalise avec les partenaires et les forces sociales de la ville pour recoudre les fractures urbaines en retrouvant un dynamisme de construction dans tous les quartiers.

C’est cette ambition pour la ville qui est celle que nous proposons pour le lycée qui me semble mise en cause dans la formule utilisée par la section du PS « le choix de la guettoisation » Faut-il comprendre que les cliniques des portes du sud seront guettoisées ? que les malades des villes voisines hésiteront à s’y faire soigner ? Faut-il comprendre que l’école de musique, le centre Michel Delay, Bioforce se sont ou vont se laisse guettoiser ? Faut-il proposer à l’URSSAF de déménager ses bureaux des minguettes ?

Accepter qu’un équipement public aux minguettes soit nécessairement un équipement de guetto, c’est dire aux vénissians qu’ils sont condamnés, c’est une erreur politique grave qui donne raison au Front National !

C’est de plus parler au nom de parents d’élèves qui n’ont pas été consultés, en tout cas pas ceux de Vénissieux ! C’est leur dire que leurs enfants sont en danger alors que jamais l’équipe pédagogique du lycée n’a évoqué un tel drame lors des réunions avec les parents.

Et c’est aussi mentir aux habitants des autres quartiers qui pensent être « en dehors du guetto » ! Car si comme cela a été évoqué sur le logement, on ne « sort plus des HLM », c’est que c’est désormais la majorité de nos populations, de vénissieux et d’ailleurs qui vivent difficilement la pauvreté et la précarisation croissante de tout le monde du travail.

Que dire aux habitants des balmes à Corbas, des razes ou de la begude à Feyzin ? qu’ils doivent fuir Vénissieux pour espérer s’en sortir ? Dans toutes les villes du Sud, l’immense majorité des habitants est confrontés aux mêmes difficultés, y compris dans la réussite scolaire de leurs enfants. Ce n’est pas le quartier qui fait la réussite, mais le milieu social et familial, la dureté de la vie et en réponse les efforts que l’éducation nationale fait pour la réussite de tous.

Ce n’est pas le lieu du lycée qui sera déterminant pour sa réussite au service des jeunes, mais bien le contenu du lycée, ses filières, y compris au-delà du BAC, l’existence de BTS, les projets et les moyens que les partenaires publics décideront. C’est de cela qu’il faut discuter ensemble pour que la reconstruction prenne tout son sens ! Car le lycée a besoin d’une vraie reconstruction sans attendre ! Depuis 30 ans, il a été délaissé, se dégradant sans que presque personne ne se mobilise pour que la région prenne ses responsabilités ! Alors, la vraie question est bien ; quand la concertation avec l’éducation nationale va-t-elle commencer sur ces questions essentielles avec les enseignants, ce qui n’est même pas le cas pour la suppression décidée de la filière comptable au profit d’une filière sanitaire et sociale au lycée professionnel, mais aussi concertation avec les parents, les partenaires économiques et la ville ?

Nous savons que certains veulent en fait supprimer ce lycée, on supprime bien des classes, des cliniques ou des maternités, des postes et des centres de sécu ! Nous savons aussi que certains mènent d’abord une bataille politicienne contre la ville de Vénissieux et ses premières réussites urbaines et sociales aux minguettes, et nous combattons avec les vénissians ces forces qui sont sur le fonds réactionnaires, pour qui l’éducation est un marché, mais nous savons aussi que certains pensent s’en sortir en reconstruisant carrément ailleurs le lycée, en l’éloignant de ce qui semble être la cause de ses problèmes. Nous leur disons, « ne vous trompez pas de combat ! Ce n’est pas les Minguettes qui sont le problème du lycée Jacques Brel, mais le renoncement qu’avaient engagé l’éducation nationale et la région, et le poids de l’individualisme, de la peur devant la violence sociale de la vague libérale qui a submergé notre pays comme tant d’autres depuis 30 ans ! Mais nous pouvons réussir comme l’a montré la longue résistance qui a permis d’aboutir aux cliniques des portes du sud ! Nous construirons le lycée Jacques Brel des portes du sud, reconnu et utile aux jeunes de nos villes, et ce lycée a toute sa place aux Minguettes, comme symbole de la réappropriation par les habitants de leur ville et de leur quartier, de la renaissance de Vénissieux, troisième ville de l’agglomération, contre le guetto et la ségrégation sociale !

Vos commentaires

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

ConnexionS’inscriremot de passe oublié ?

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom

Revenir en haut