Une orientation budgétaire dans la crise et la réforme des collectivités ! Enregistrer au format PDF

Dimanche 5 décembre 2010

Comme chaque collectivité, le Grand Lyon a lors du conseil communautaire du 29 Novembre débattu de l’orientation budgétaire proposée par la direction du Grand Lyon en prévision du vote du budget 2011.

J’ai transmis au groupe communiste et citoyen les remarques suivantes à la lecture du document d’orientation. Sans revenir sur le contexte économique global de la crise et de ses conséquences, il s’agissait d’attirer l’attention sur ce qui était porteur de décisions budgétaires importantes du Grand Lyon.

Il est évident que la crise de l’Euro, les plans de rigueur sans cesse durcis pour faire payer la crise aux salariés tout en assurant la rentabilité et la liquidité aux investisseurs seront déterminants dans les années qui viennent, quoique décident les collectivités locales. Si après la Grèce, l’Irlande et le Portugal, les marchés financiers s’attaquent à la France, l’énormité des sommes en jeu rendront impossibles tous les mécanismes de soutien de la BCE ou du FMI. Les gouvernements qui ne remettront pas en cause les logiques des banques et de l’Euro tenteront d’imposer alors, comme en Grèce ou en Angleterre, des mesures de rigueur sans précédents et que nous avons de la peine à imaginer. Réduction forte des salaires, licenciements massifs dans la fonction publique, fermetures accélérées d’écoles, d’hôpitaux, de commissariats ou de palais de justice… L’avenir peut rendre bien anecdotique les décisions budgétaires que peut prendre la communauté. Mais cela ne fait que rendre plus important encore les décisions à prendre.

Reprise de l’investissement en 2011 ?

L’orientation proposée repose sur le pari d’une reprise de l’investissement en 2011, s’appuyant sur les annonces du gouvernement. Ce pari est risqué. LA crise est devant nous car les mesures prises par le FMI, l’UE et le G20 au plan international, par le gouvernement Fillon 1 et les annonces du Fillon 2 au plan national, ne font qu’aggraver les causes profondes de la crise… l’écrasement du travail et la paupérisation de parts toujours plus larges de la population, en même temps que la priorité absolue aux élites et gagnants de la guerre économique, Les informations sur Renault, le désengagement de l’état de Renault Truck, l’abandon par Bosch de la France, les craintes sur la chimie… tout confirme que nous allons vers de nouvelles casses industrielles d’ampleur, donc des pertes d’emplois et de création de richesse, une accélération du déficit commercial de la France, donc une fragilisation de sa situation financière, dont les spéculateurs vont bien sûr chercher à profiter. Une orientation protégeant les intérêts des habitants devraient anticiper sur ce risque fort.

la baisse des ressources des collectivités locales avec les réformes de la taxe professionnelle et des collectivités

Le document proposé évoque la baisse des recettes des collectivités, confirmé dans le rapport parlementaire Carrez Thenaux, qui annonce au total une perte de 5% des recettes pour l’ensemble des collectivités locales en France. Or, le Grand Lyon considère qu’il sortira gagnant et prévoit une hausse de 3,9% de ces recettes.

Dans un premier temps, le fait que l’agglomération s’en sorte mieux que le reste de la région ou de la France ne nous rassure pas, car nous ne cherchons pas à être du coté des gagneurs de la concurrence entre territoires, alors que nos habitants sont insérés dans des réseaux familiaux et de connaissances bien plus larges qui fait rejaillir partout ce qui se passe partout. La réforme des collectivités va certes renforcer les inégalités territoriales, mettant en cause toute politique publique d’aménagement cohérent du territoire. Mais les lyonnais ont de la famille dans le midi, le centre, les alpes, le nord… et beaucoup à l’étranger. La crise frappe donc les familles de partout !

Or, pour maintenir le niveau des dépenses de la communauté, l’orientation budgétaire proposée repose sur une augmentation forte de la taxe d’habitation, annoncée de 10% sur le taux ! L’orientation fait donc payer les locataires. Or, si la réforme de la taxe professionnelle réduit la marge de manœuvre des collectivités, il reste un taux de contribution des entreprises que la communauté peut augmenter. Au niveau d’un débat d’orientation budgétaire, il semble essentiel d’affirmer la nécessité d’augmenter cette contribution des entreprises, bien que le cadre légal le rendre difficile puisque augmentation pour les entreprises est liée par la loi aux augmentations pour les habitants.

Mais la situation de 2011 est exceptionnelle ! Les entreprises ne paieront plus la taxe professionnelle qui est remplacée par deux taxes, l’une dont les taux sont fixés par l’état, et l’autre fixée par la communauté. Or, les simulations présentées représentent un véritable cadeau fiscal aux entreprises de l’agglomération qui atteint 280 M€ [1] ! En fait, pour les habitants, c’est une hausse de 10% et pour les entreprises une baisse de 50% ! (voir l’article précis sur ce sujet)

Dans ces conditions, on ne peut se contenter d’adapter le budget du Grand Lyon aux conséquences de la réforme des collectivités. Certes, la perte de recettes de taxe professionnelle est presque entièrement compensée par le transfert de la taxe d’habitation du département et une compensation de l’état. Mais il reste que pour les entreprises c’est tout bénef ! Et que très peu vont utiliser ce cadeau fiscal pour investir et créer des emplois pour l’agglomération.

C’est d’autant plus important que depuis 2002, le Grand Lyon touchait directement la taxe professionnelle devenue « TPU ». Avant, c’étaient les communes qui bénéficiaient du dynamisme économique de leur ville. Avec la TPU, tout a été concentré au niveau de l’agglomération qui reversait aux communes une dotation figée au niveau de 2002. Résultat pour les communes industrielles comme Vénissieux, une perte de recettes de plusieurs millions par an ! A l’époque, il avait été dit que les règles de compensation aux communes seraient réévaluées quelques années plus tard. 8 ans plus tard, on attend toujours alors que la réforme de la TP vient tout bousculer. Les inégalités créées depuis 2002 vont donc être figées dans le marbre des nouvelles taxes, et recettes qui remplacent la TP et qui sont décidées par l’état. Il est donc indispensable que cette évaluation des reversements aux communes soit faite rapidement pour prendre une décision qui rééquilibre la compensation de solidarité à partir du constat depuis 2002. Le montant 2011 prévu est de 213M€ (p18), sans que le montant 2010 ne soit indiqué, donc on ne sait pas s’il y a hausse ou baisse.

Les dépenses de fonctionnement

Dans le contexte de crise, il semble indispensable de dire la vérité aux habitants et aux salariés de la communauté. On ne peut continuer à augmenter les effectifs et la masse salariale sans mettre en cause à terme les missions de service public. Dans la tempête économique qui s’est levée et ne va pas nous épargner, il faut se concentrer sur ce qui est essentiel au cadre des vie des habitants. Ce sont les missions de proximité qui doivent être considérées comme prioritaire, et il faut absolument faire le point sur une évolution des effectifs qui n’a pas concerné les missions de voirie, de propreté ou d’assainissement.

les dépenses d’investissement

Le volume important d’investissements correspond au plan de mandat et porte de nombreux projets essentiels pour les habitants. Mais l’orientation semble considérée que tout ira pour le mieux et qu’on peut prévoir une augmentation suffisante des recettes pour un investissement prévu dans le mandat qui passe de 1900 M€ à 2300M€…

Un débat d’orientation devrait présenter des scénarios à partir d’hypothèses pessimistes et optimistes pour comprendre l’impact des grandes décisions. Il y a dans le plan de mandat quelques très grands projets qui représentent une grande part des investissements. Mais il y aussi de très nombreux « petits projets » qui sont essentiels au quotidien des habitants, comme ceux concernant l’assainissement, l’entretien des voiries, les conditions de la collecte, les économies d’énergies…

Que se passe-t-il si la situation est plus difficile que prévue, si les compensations prévues par l’état sont en dessous des annonces, si le gouvernement Fillon 3 annonce un plan de rigueur aggravé, remet en cause les engagements existants sur de grands dossiers ?

Le Grand Lyon est une collectivité avec de grands moyens mais dont plusieurs missions du quotidien sont sous tension. Si nous avons obtenu une mesure exceptionnelle pour les trottoirs à Vénissieux, toutes les études montrent qu’il faudrait dans toute l’agglomération une augmentation forte des dépenses de voirie pour ne pas constater de dégradation en moyenne.

Cet équilibre entre grands projets et investissements dans les missions de gestion urbaine est difficile à trouver et le document d’orientation ne permet pas vraiment de se prononcer.

Un budget pour la métropole ?

Toutes ces orientations interagissent avec la réforme des collectivités locales. Le groupe communiste s’oppose sans ambiguïté à la création d’une métropole qui serait un affaiblissement radical des communes, l’éloignement des citoyens dans une structure centralisée à grande échelle… et rendrait encore plus difficile les missions de gestion urbaine, de proximité. Or, la loi votée à une courte majorité finalement peut être tentante pour ceux qui veulent accélérer la réduction des dépenses publics utiles !

Il est donc essentiel d’inventer une nouvelle organisation des pouvoirs dans l’agglomération entre communauté et communes. La réforme renforce encore la spécialisation des compétences par collectivité, rendant plus difficile le travail à plusieurs niveaux, au niveau de la commune pour la citoyenneté et la décision politique, au niveau intercommunal pour mutualiser les outils et les compétences humaines. Nous devons proposer une autre organisation de la communauté pour aller vers « plus de mutualisation et moins de centralisation communautaire », pour redonner aux communes un rôle clé dans la construction du lien politique citoyen.

[1une somme qui permettrait facilement de financer le Grand Stade pour garder un stade public ouvert à tous

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