Club du développement durable du Grand Lyon

Quelle stratégie durable au Grand Lyon Enregistrer au format PDF

entre droits et sobriété…
Mercredi 17 avril 2013

J’ai participé ce 16 Avril au club du développement durable qui se tenait à Givors dans l belle maison du Rhône. Il y avait un beau rayon de soleil et le fleuve était magnifique…

Mais bien entendu, il ne s’agissait pas de tourisme, mais d’une rencontre de travail sur la stratégie de développement durable du Grand Lyon. Une première séance générale introduite par les deux vice-présidents concernés, Michel Reppelin et Bruno Charles, avant un travail en atelier par « territoire » des conférences des maires…

Quelques réactions reprenant ma participation aux discussions.

Bruno Charles avait évoqué une évolution de la mobilisation des services du Grand Lyon sur les projets de sa compétence, vers une étape nouvelle où il s’agirait d’entrainer la société civile, citoyens, associations, entreprises…

C’est pourquoi j’ai demandé un état des lieux de la participation citoyenne dont tout le monde parle, mais dont tout le monde constate les limites et les difficultés. L’aggravation de la crise, les questions sociales, économiques sont déterminantes, sans compter la crise de confiance politique envers les institutions.

Mobiliser les citoyens, c’est construire sous une forme ou une autre un « contrat social », un ensemble d’idée pour vivre ensemble, organiser la ville et la société ensemble, bref une politique au sens fort. Les mots ont donc une grande importance. J’ai été frappé par exemple de l’usage répété du mot « sobriété », qui semble être la clé de la stratégie durable. Mais être sobre, c’est ne pas consommer ou très peu ! Un animal sobre est un animal qui peut rester longtemps sans boire.. Est-ce que c’est ce que nous proposons comme futur aux êtres humains ?

On peut comprendre le mot sobriété comme « efficacité ». Les gâchis d’eau, d’énergie, de nourriture, d’espaces, sont aberrants dans un monde fini, et il est donc légitime d’être « efficace » dans l’usage des ressources.

Sobriété, Austérité ou défense des droits humains et sociaux ?

Mais on peut comprendre « sobriété » comme un mot poli pour ne pas dire « austérité », pour de fait justifier de forcer tout le monde à se serrer la ceinture ! Dans un contexte de crise sociale exacerbée, et d’aggravation sans fin des inégalités, ce serait totalement injuste et de toute façon inefficace de dire « serrez-vous la ceinture ». C’est même irresponsable, car si chacun peut choisir de vivre comme un ermite s’il le souhaite, nous défendons au contraire des DROITS de l’’existence, le droit au logement, à la nourriture, au déplacement… avec des objectifs qualitatifs. Un bon logement, correctement chauffé et éclairé, de la nourriture saine et de qualité, des déplacements faciles, confortables… Et ces droits supposent des conditions économiques, c’est à dire un coût accessible.

Le mot sobriété ne dit rien de toute cela. Il s’oppose aux dérives d’une société de consommation sans tenir compte que cette société de consommation repose sur de terribles inégalités !

J’essaie au contraire d’affirmer par exemple un droit à une énergie décarbonée, propre, efficace et accessible.

  • décarbonée car c’est la priorité du plan climat. il faut cesser de bruler des énergies fossiles pour se déplacer, se chauffer, ou fabriquer de l’électricité
  • propre car il faut aussi tenir compte des pollutions diverses liées par exemple à la combustion, et qui font que le chauffage bois doit être régulé, et développé surtout dans les réseaux de chaleur qui peuvent intégrer des systèmes de filtration trop couteux pour les chaudières individuelles
  • efficace car il faut favoriser les bons usages de l’énergie, limiter partout les pertes, faire évoluer les systèmes techniques, les bâtiments pour augmenter l’efficacité énergétique de chaque usage. On sait par exemple diviser par deux la consommation de chauffage d’un bâtiment ancien.
  • accessible, car c’est la condition de la réalisation concrète du droit. Certains acceptent et même revendiquent l’augmentation du coût de l’énergie. De fait, ils acceptent que le marché détermine qui aura droit ou pas à l’énergie. Et on sait que le prix du pétrole n’est pas déterminé principalement par la réalité des réserves mais pas les stratégies spéculatives des grands pétroliers, que le prix de l’électricité augmente principalement pour favoriser l’entrée des producteurs privés sur ce marché…

Quelles actions urgentes pour la stratégie durable du Grand Lyon ?

La première des urgences dans la situation économique et sociale devrait être la solidarité sociale, l’emploi, la défense des droits fondamentaux…

La déclaration de Rio commençait ainsi par dénoncer la pauvreté dans la planète, comme un des obstacles principaux à un développement durable. Or, si la pauvreté a reculé en Asie et en Amérique Latine, elle s’est aggravée en Afrique et.. en Europe ! On sait désormais que des milliers de familles vivent en France dans la rue. Il y a bien sûr des des migrants, des réfugiés comme les Roms, mais il y a aussi des familles Françaises avec ce qu’on appelle désormais les « travailleurs pauvres ». Ces femmes qui sont contraintes de travailler à temps partiel dans la grande distribution et qui ne s’en sortent pas. Ces travailleurs précaires qui courent de stages en intérim et qui au total, ne gagnent pas le SMIC, et ces milliers de familles au RSA qui n’attendent plus rien de Pole Emploi. OR, cette grande pauvreté a des conséquences aussi sur l’environnement, le cadre de vie, la gestion des déchets urbains par exemple qui pour certains devient une source de marché parallèle comme on le voit aux Minguettes.

Et il ne s’agit pas de « faire la charité », ni de renvoyer le problème aux habitants qui devraient faire preuve de solidarité par eux-mêmes, même si bien sûr, on ne peut que soutenir et aider le travail extraordinaire que font les Restos du cœur, le Secours Populaire, le Secours Catholique, Emmaus… Il faut une politique publique, au niveau de l’état comme au niveau de l’agglomération, qui affirme et défende des droits !

Et le premier des droits est sans doute le droit à l’emploi ! Car dès qu’on a un vrai travail, tout le reste peut se résoudre, mais sans emploi, tout ce qu’on peut faire est fragile et remis en cause à chaque instant.

Or, la place de l’industrie dans l’agglomération est en grand danger comme dans toute la France. La ville de Lyon a pratiquement perdu toute son industrie historique, et un des derniers sites industriels, Jeumont Schneider Transformateur, voit partir certains productions en Inde… La vallée de la Chimie est mise à mal par les affairistes comme Kem’One, et les vrais décideurs que sont le groupe TOTAL et son ex filiale ARKEMA jouent au Monpoly discrètement. Ajoutons Bosch, Veninov, SAnofy et le tableau montre une véritable urgence : réaffirmer une ambition industrielle pour l’agglomération Lyonnaise, défendre les zones industrielles et empêcher la spéculation foncière sur les terrains, développer la formation pour l’emploi qui existe et intervenir auprès des grands groupes pour obtenir des investissements dans la production. On oppose trop souvent au Grand Lyon la « nouvelle économique » à l’industrie, la « recherche et développement » à la production comme si les « biotechs », ou autre « cleantech » étaient la solution ! Or, pendant que les grands groupes bénéficient des subventions publiques pour la recherche avec les pôles de compétitivité, ils ferment leurs activités de production, et même dans le cas de Sanofy, des activités de recherche !

L’agglomération est un donneur d’ordre important pour le développement des transports, qui demandent des moteurs, des rails, des bus… pour le développement de l’efficacité énergétique qui a besoin de matériaux, de chantiers, de pompes à chaleur, de réseaux de toute sorte… et tout cela suppose des productions industrielles… Prenons l’exemple du photovoltaique. Jusqu’à quand allons-nous faire payer sur nos factures EDF les subventions qui ne profitent principalement qu’à quelques commerciaux, et producteurs internationaux de panneaux ?

Comment travailler entre Communes et Communauté ?

Bruno Charles a évoqué l’ambition avec la métropole de faire mieux que les « technocraties des grands corps d’état ». Mais je crains que les technocraties métropolitaines soient encore moins soucieuses de l’intérêt général, car avec des contradictions, les grands corps d’état étaient les outils du service public, de l’égalité républicaine, de l’aménagement global du territoire. Au contraire, les villes et les régions s’inscriront d’abord dans la concurrence des territoires, et les plus riches bien sûr seront les gagnants, et ne voudront plus être solidaire des autres. C’est ainsi que la Catalogne veut cesser de « payer pour Madrid », que les Flamands ne veulent plus payer pour les Wallons, que l’Italie du Nord veut oublier l’Italie du Sud… Et cette logique de concurrence se développe même à l’intérieur des régions ou des villes riches ! Qui peut dire que le développement récent de l’agglomération Lyonnaise, bénéficiant pourtant d’une forte dynamique économique, a réduit les inégalités dans l’agglomération entre Est et Ouest, entre ville centre et quartiers populaires ?

Mais le projet d’instituer une « Euro-Métropole » ne tient même pas compte de l’expérience accumulée sur les différentes échelles de décision nécessaires. Plusieurs témoignages ont montré que selon les projets, l’espace de décision est différent, et qu’il ne correspond pas aux « conférences des maires ».

  • Quand on regarde le bassin d’emploi de la vallée de la Chimie, il déborde très largement du département, notamment sur l’Isère.
  • Quand on pense Vallée de la Chimie, Vénissieux discute avec Pierre-Bénite
  • quand on pense réseau de chaleur, Vénissieux discute avec St-Fons mais pas avec Corbas,
  • Quand on parle des Grandes Terres, Vénissieux parle avec Feyzin et Corbas, mais pas avec St-Fons…
  • Quand on parle du contournement ferroviaire, le CFAL, la communauté urbaine est trop petite ? et l’Ouest Lyonnais se frotte les mains d’avoir une infrastructure de plus à l’Est…
  • Quand on parle de l’anneau des Sciences, il faut parler du contournement Ouest de Lyon, qui concerne toute la région…

Bref, il est totalement faux de dire qu’une seule institution centralisée à l’échelle de la communauté urbaine est la réponse aux besoins de meilleurs coopérations face aux besoins de l’aire urbaine de Lyon !

Au contraire, on se rend compte dans chaque cas, que ce sont les communes qui sont le vrai lieu où peut s’organiser une vraie concertation, ou les élus sont connus et accessibles aux habitants, où ils peuvent s’engager, se mobiliser pour un projet, affronter les contradictions d’intérêt et faire progresser l’intérêt général… Certes, tous ne le font pas, et certains favorisent au contraire le « pas dans mon jardin », et renvoie les problèmes sur leurs voisins… Mais les citoyens peuvent s’en saisir, et s’il faut interpeller un maire, ils savent le faire, alors que tenter d’interpeller un président d’agglomération ou de région… !

L’exemple du syndicat intercommunal des Grandes Terres montre au contraire une autre approche de l’agglomération. Prendre du recul à l’échelle de l’agglomération et de la région pour définir une stratégie globale, cohérente, mettre en place les ressources et les règles de financement des actions, et organiser à l’échelle pertinente du territoire, dans ce cas avec le syndicat des trois communes concernées, le travail au plus près des acteurs de terrain.

Cette articulation entre une compétence au plan stratégique à une échelle large, pour beaucoup de sujets l’agglomération, et une compétence opérationnelle de proximité basée sur l’engagement libre de communes capables de porter leur choix politique avec les citoyens, est une bien meilleure approche que cette euro-métropole tentaculaire…

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