Conseil municipal du 17 décembre 2018

La colère populaire contre l’injustice sociale et fiscale Enregistrer au format PDF

Mardi 18 décembre 2018

Merci madame le maire de faire écho en ce début de conseil à la colère populaire contre l’injustice sociale et fiscale et de donner le temps d’un premier débat en permettant à chaque force politique de s’exprimer. La fracture politique et citoyenne qui marque notre pays, a conduit celui qui se présentait comme Jupiter à descendre de son Olympe Elyséen, avec retard et difficulté, et à nous demander d’organiser des débats publics. Quel aveu ! Celui qui n’avait pas de mots assez durs pour l’ancien monde, celui qui avait séduit 18% des inscrits en se présentant comme neuf, 18% seulement, mais cela lui a suffit pour devenir président, ce représentant commercial des banques et de la finance qui a réussi le tour de force médiatique de faire croire à un nouveau monde, celui-là même, bousculé par l’histoire ancienne et toujours actuelle des luttes sociales, celui-là demandent aux entreprises, aux syndicats et aux élus locaux de tenter de retisser un lien social que sa propre pratique politique avait rejeté et même ringardisé.

Le président a ainsi découvert la profondeur de la fracture politique et citoyenne qui marque notre pays, la défiance à l’égard des institutions, de notre vie démocratique, des partis politiques eux-mêmes. Mais il faut dire que cette fracture est aussi pour nous tous à la fois un symptôme et un défi.

Un symptôme de la fracture entre la majorité de ceux qui vivent ou survivent de leur travail ou de la solidarité et les élites politiques, économiques, sociales, médiatiques, culturelles qui ont partout la parole pour dire ce qui est bien, efficace, soutenable, mais qui ne parlent du peuple que pour proposer de compenser les inégalités par des mesures dites sociales qui sont immédiatement accusées de creuser les déficits et qui donc, opposent les Français entre eux. Nous avons souvent dit que les discours des « bons gestes », que ce soit contre les incivilités ou pour l’environnement ne résistent pas aux dures réalités des inégalités sociales. La colère, la révolte parfois de ceux qui ne s’en sortent plus, qui voient leurs dépenses contraintes augmenter alors que leurs revenus stagnent malgré les efforts qui leur sont demandés au travail, cette colère est un terrible symptôme de l’échec des politiques publiques conduites depuis des décennies, celle de la baisse du coût du travail qui masque la réalité des ultra-riches et de la fraude fiscale, celle de la transition énergétique, qui masque la marchandisation et la déréglementation de l’énergie. Cette colère est aussi le symptôme de la crise démocratique, de la crise des promesses d’une gauche qui devait changer la vie mais a organisé la concurrence généralisée contre les droits sociaux, de la crise d’une droite qui court derrière son extrême sans pouvoir proposer un projet républicain, d’une écologie qui masque le système derrière les techniques et se révèle compatible avec les injustices et l’électoralisme.

Mais elles sont aussi un défi, car elles peuvent pousser à opposer les Français entre eux, ceux qui survivent depuis longtemps aux minimums sociaux et qui se demandent pourquoi les colères actuelles ne s’exprimaient pas ces dernières années contre la pauvreté, la précarité, les expulsions… Elles peuvent opposer ceux qui ne voyant que l’injustice fiscale sont prêts à réduire les dépenses publiques sans voir que l’injustice fiscale est d’abord l’injustice sociale du blocage des salaires depuis des décennies quand les superbonus des spéculateurs et des très hauts-salaires s’envolent. Elles peuvent opposer ceux qui profitent du dynamisme économique de quelques secteurs notamment dans les métropoles et ceux qui voient se défaire leur cadre de vie, délaissé par une mondialisation toujours plus sélective.

En contraignant ce gouvernement à accorder 10 Milliards d’euros d’aides diverses, cette colère populaire a bousculé la vie politique, et nous espérons qu’elle se poursuive en trouvant le chemin de sa propre organisation, de sa propre prise de conscience politique, et donc de l’engagement pour ne pas se contenter des miettes que ce gouvernement fait sembler de leur donner, alors qu’il fait payer toujours les mêmes, et protège toujours les vrais gagnants de cette société pour les riches.

La première étape serait de faire converger le maximum de forces sociales pour arracher, comme en 1968, une forte augmentation des salaires, une augmentation qui ne soit pas payée par la fiscalité, mais bien par les entreprises, ce qui obligerait les dirigeants économiques et politiques à considérer enfin le travail comme la vraie richesse, et non comme une marchandise qu’on recrute et qu’on jette.

Une nette hausse des salaires bousculerait tous les discours actuels sur le social. Car le chômeur n’est pas responsable du chômage ! Pole Emploi, plutôt que de perdre du temps à contrôler les chômeurs, ferait mieux de dépenser son énergie pour contrôler les entreprises afin qu’elles créent des emplois, et les aider à mieux utiliser les savoir-faire qui sont la vraie richesse. Plutôt que de faire confiance aux marchés pour orienter l’économie, il faut faire confiance aux salariés pour valoriser leurs compétences ! Que chaque entreprise recrute 10% de ses effectifs, ce qui revient à supprimer le chômage, et qu’ensemble, les salariés inventent les emplois de demain. Que tous les PDG proposent aux cadres et aux syndicats d’organiser des débats sur les emplois concrets à créer partout et sur les besoins de formation ! On supprimerait d’un coup la dette de la SECU, le trou des retraites, et même les allocations chômage donc l’UNEDIC… Au lieu d’opposer le social coûteux et l’économie créatrice, renversons la table et dirigeons l’économie par les besoins humains, avec comme premier objectif un travail de qualité.

La deuxième étape serait de relever le défi pour la démocratie elle-même, le défi d’une représentation politique qui ne soit pas une dépossession, défi que la commune de Paris tentait de relever avec le mandat révocable, le défi d’institutions démocratiques qui ne soient pas des technocraties coupées des citoyens, le défi d’une démocratie réellement participative, dont nous savons bien à Vénissieux l’importance comme la difficulté. Depuis presque 30 ans, avec les conseils de quartier, nous proposons aux citoyens de prendre la parole et de s’organiser en relation avec les services publics pour porter non pas seulement des doléances, mais pour être réellement des acteurs. Nous mesurons le chemin parcouru avec l’invention des délégués de quartier, puis récemment de la plateforme numérique mise à leur disposition, mais nous mesurons aussi le chemin à parcourir, tant nous voyons que ce sont les urgences du quotidien qui dominent le débat citoyen.

Mais s’il y a beaucoup à expérimenter, comme les plateformes numériques citoyennes, ou le référendum d’initiative citoyenne souvent évoqué dans les manifestations, nous savons aussi qu’à la fin, le premier enjeu de la démocratie est de s’imposer dans une société dirigée par les plus puissants, ceux qui pèsent des milliards et qui possèdent les médias et les banques, et qui sont les vrais décideurs derrière Emmanuel Macron, ceux qui l’ont choisi et le conseillent pour faire passer les pilules des riches.

C’est le plus grand défi pour les gilets jaunes, les lycéens, les blouses blanches ou les cols bleus : trouver les formes du mouvement qui construisent le rapport de forces nécessaire, tout en élargissant son unité et le soutien populaire le plus large. Comment retourner la violence sociale qu’impose ce gouvernement sans jamais laisser la violence nous diviser, comment bloquer réellement les profits des plus grands sans perdre le soutien de ceux qui ont un peu et craignent de le perdre…

C’est pour notre part, la première leçon que nous tirons, pour tous, mais entre autres pour le parti communiste et ses élus. Trop longtemps, nous avons laissé croire que les élections et les grandes journées nationales d’actions pouvaient imposer un changement de politique. Trop longtemps nous avons fait comme s’il suffisait de voter pour construire un rapport de forces. Certes, comme le disait un ancien dirigeant du MEDEF, on ne fait pas la même politique quand le PCF fait 20%, mais cela ne suffit pas. Nous tirons les leçons de notre histoire, ce qu’a commencé à faire le dernier congrès du parti communiste. Nous appelons notre peuple à relever la tête, même s’il faut prendre le temps de la trêve de Noel, à s’organiser pour que le mois de Janvier soit un mois de mobilisations sociales et politiques fortes pour une vraie augmentation des salaires, et un processus de reconstruction politique d’une république sociale.

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