Conseil de la métropole du 15 décembre 2017

une fondation contre la démocratie universitaire ! Enregistrer au format PDF

Délibération 2017-2414:Attribution d’une subvention à la Fondation pour l’Université de Lyon (FPUL) pour le projet BigBooster,
Mercredi 20 décembre 2017

4 min

Monsieur le président, chers collègues,

voici donc revenu le "bootcamp non profit du bigbosster de startup"… Avez-vous une traduction ? Je vous propose "camp d’entrainement à but non lucratif du grand amplificateur de jeunes pousses"… L’anglicisation de nos délibérations, comme d’un grand nombre d’activités publiques pourtant soumises théoriquement à la loi Toubon, comme le "made for sharing" de Paris, révèle à quel point les décideurs ne respecte la loi que quand ca les arrange, ignorant avec dédain la loi Toubon. Bernard Cerquiglini, Recteur de l’Agence universitaire de la francophonie dit qu’elle : « renforce la francophonie en France et dans le monde ». Sauf que pour les textes de la commission européennes, le pourcentage de documents produits en français est tombé de 38 % à… 4,4 % entre 1996 et 2013 !

Comme enseignant-chercheur, je peux vous dire que cette anglicisation a des conséquences désastreuses sur l’édition scientifique de langue française, il est devenu impossible de faire vivre une revue de bon niveau francophone, alors que nos voisins allemands, comme nos amis chinois, maintiennent et développent leur édition scientifique.

C’est un enjeu économique fondamental, car derrière l’édition scientifique et sa maitrise, c’est la capacité d’innovation, de créativité, qui est en jeu. Le globish que le MEDEF impose de plus en plus dans les entreprises est un fantastique rouleau-compresseur d’appauvrissement de créativité et de la place de la France dans le monde.

Cette anglicisation est par contre tout à fait compatible avec la transformation accélérée de l’université française que les réformes successives des Labex, Idex et autres outils d’excellence ont produit, comme cette fondation qui a justement pour but de donner plus de places au MEDEF dans le monde universitaire. Son premier président, Alain Mérieux disait que "La Fondation pour l’Université de Lyon est la preuve que tout est possible".. Enfin, tout, pas vraiment. Ce qui l’intéresse, l’entrepreneuriat, la recherche pilotée par l’aval profitable, la sélection,… sans nul doute, mais la recherche fondamentale ou le droit d’accès à l’université pour toutes les catégories sociales, certainement pas !

Ce discours d’un grand patron justifie la restructuration de l’université parce-que des élèves de polytechnique sont partis en Californie fonder des entreprises à succès. Il parait que personne ne les soutenait en France. Mais bien entendu, c’est l’université qu’on accuse, pas les banques ni les grandes entreprises qui auraient du être les soutiens naturels de ces jeunes investisseurs… Non, il faut au contraire donner tous les pouvoirs à ces entreprises sur l’université. C’est le cas avec les pôles de compétitivité qui dépensent l’argent public sur les seuls choix des entreprises. C’est le cas avec cette fondation dont le comité d’orientation est constitué d’un collège institutionnel de 6 membres, dont la métropole, un collège socio-économique sans aucun représentant de salariés, et un collège dit académique de 6 membres avec seulement 3 universitaires en activité…

L’université est un des lieux d’invention et de défense de la démocratie, et je fais partie d’une génération qui a connu une université où les enseignants, les personnels, et les étudiants, étaient les décideurs réels, dans des conseils d’université où les personnalités extérieures étaient un complément à l’organisation de la vie démocratique, qui plus est à l’image d’un conseil économique et sociale, représentant aussi bien le patronat que les salariés.

Tout cela est du passé, et la création de l’Université de Lyon, de sa fondation a conduit à des structures de décisions "resserrées" comme on dit, et quand on passe un conseil d’administration de 80 membres dont 10 personnalités extérieurs à des conseils de 30 membres dont 15 personnalités extérieures, chacun comprend qu’on a changé d’ère et que la démocratie universitaire est une vieillerie…

C’’est pourquoi, à la demande de nombreux élus enseignants-chercheurs concernés, nous voterons contre cette délibération et nous appelons tous les élus de ce conseil à prendre connaissance des prises de position de l’immense majorité des élus des personnels, enseignants et chercheurs de l’unviersité et des écoles !

Personne ne fera l’université de demain sans eux !

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