La commission proximité du Grand Lyon du 21 avril a fait le point des actions d’éducation au développement durable. La présentation mettait très bien en valeur les nombreuses initiatives portées par les associations autour de l’arbre, des ruisseaux, du vélo, des espaces agricoles comme le plateau des Grandes Terres au sud de Vénissieux…

Elle a aussi évoqué une initiative conjointe avec l’éducation nationale, la réalisation d’un passeport éco-citoyen, destiné à être distribué dans les écoles

Je suis intervenu pour témoigner de mon interrogation sur ce « passeport » dont la lecture ne peut laisser indifférente… La forme est bien adaptée au public visé, mais le contenu est plus discutable…

Sur un sujet dont les conflits à Copenhague ou les débats vifs d’un Grenelle pourtant consensuel montre le caractère très politique, il faut faire attention de différencier ce qui relève de la connaissance, des faits, d’une démarche scientifique qui peut donc être vulgarisée, et ce qui relève des choix, des orientations, des priorités politiques… Ce qui suppose de laisser la place à l’interprétation, la compréhension personnelle, l’effort nécessaire de connaissances. Le développement durable ne relève pas d’un catéchisme !

Or, ce passeport ne pose aucune question, ne laisse place à aucun doute, à aucune analyse ou démarche d’interrogation… Il affirme un grand nombre de choses considérées comme des « évidences » qui ne peuvent (ne doivent ?) pas être discutées.

Celà conduit à une approche manichéenne dans laquelle les auteurs se font piéger sur des valeurs pourtant consensuelles. Ainsi, le document présente sous la forme d’acteurs représentés par des dessins, les différents points de vues qu’on peut entendre sur le développement durable. Tout les points de vues sont « positifs » et donc leurs auteurs sont des « gentils », mais il y a un contre exemple avec un couple qui sur tous les sujets dit ce « qu’il ne faut pas dire », par exemple qu’ils préfèrent regarder leur émission de variété préférée plutôt que de s’intéresser aux risques majeurs. Dans ce couple citadin, la femme est en jupe courte, alors que la maman consensuelle qui organise le pédibus pour emmener son enfant à l’école est en pantalon.

Cette caricature porte sans le vouloir des messages implicites plus que discutables. Dans le même esprit, ce document propose comme perspective en 2050 de consommer en cuisine plus de produits bruts… comme si cela n’avait pas de conséquences sur l’organisation de la vie familiale, comme si l’invention du surgelé, du pré-cuisiné, de tout ce qui réduit le temps de cuisine quotidien nécessaire n’était pas un enjeu de la libération de la femme des contraintes ménagères ? On peut avoir une discussion et des avis différents sur cette question, mais on ne peut pas considérer qu’il s’agit d’un message neutre…

Sur de nombreuses questions sociales, la recherche d’un discours « politiquement correct » sur un sujet pourtant sensible donne des résultats discutables. Affirmer que « la fraternité est prise en compte progressivement dans l’histoire » est quand même un peu court, et difficile à comprendre dans des quartiers populaires qui vivent au jour le jour la ségrégation sociale grandissante de notre société !

Enfin, si le document montre les risques concernant la planète, et les enjeux des questions nationales, il ne présente le Grand Lyon qu’à travers des réussites et des actions exemplaires, sans jamais dire les difficultés ou les insuffisances. Or, comment parler du tri sélectif sans évoquer les dépôts sauvages et la salissure urbaine, comment parler d’isolation thermique dans des quartiers de logements sociaux ou aucun financement n’est prévu et ou souvent la facture énergétique s’envole ?

Ce document pose une question sur la marge entre le débat politique et l’éducation citoyenne. Personne n’accepterait que sur un autre sujet, comme la pauvreté ou le chômage, l’éducation nationale réalise un document de même nature pour des enfants de primaire. Or, sur le développement durable, on veut faire comme s’il existait des évidences « neutres », en dehors du débat politique. Et bien, c’est plus compliqué. Il y a des connaissances scientifiques, notamment de l’écologie comme science, et leurs vulgarisation est nécessaire et utile. C’est vrai des conditions de la biodiversité, de l’efficacité énergétique, de la qualité de l’air… Mais ces connaissances n’apportent pas de réponses par elle-même sur les choix de société. Et nous ne pouvons pas dire à nos enfants « tout va bien, nous avons les réponses sur tous les sujets »…

Au minimum, ce document mérite un débat !

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