Après la réduction des APL, le gouvernement veut affaiblir la loi SRU ! Enregistrer au format PDF

Vendredi 1er septembre 2017

Un article du Monde a mis le feu aux poudres, le gouvernement pourrait remettre en cause la gestion des seuils SRU [1], ces 25% de logement sociaux que toutes les communes de plus de 3500 habitants doivent avoir d’ici 2025… Bien sûr, les déclarations rassurantes se multiplient « rien n’est décidé », « c’est simplement une consultation exploratoire »… On a l’habitude des gouvernements qui font des coups d’essais pour tester l’opinion publique en laissant fuiter des annonces pour adapter ensuite leur décision au niveau de réaction constaté.

En tout cas, le gouvernement reconnait que le sujet est ouvert, et on sait que l’ancien président de la métropole devenu un ministre qui compte, Gérard Collomb, a une opinion très négative sur ce seuil SRU. Il avait d’ailleurs fait comme président de la métropole un beau cadeau aux communes de l’Ouest Lyonnais qui ne le respecte pas en décidant d’une « mutualisation » de ce seuil avec la ville de Lyon, ce qui présentait un double avantage, concentrer les financements sur la construction à Lyon et laisser tranquille des maires qui ne veulent pas trop de logement sociaux à l’ouest…

Ce qui est sûr, c’est que le gouvernement a lancé officiellement une consultation préparatoire à une future loi logement, qui doit se terminer le 10 septembre pour un conseil des ministres le 13 septembre. Les objectifs sont listés en 5 alinéas

  • favoriser une offre de logements adaptée à tous nos territoires ;
  • accompagner la demande de logements dans les territoires détendus ;
  • promouvoir la rénovation énergétique des logements, en priorité ceux des ménages modestes ;
  • faciliter l’accès au logement et la mobilité au sein des parcs de logement, en particulier vis-à-vis des publics jeunes, actifs ou modestes ;
  • développer l’insertion par le logement d’abord.

Tous les acteurs du logement savent que derrière ces titres, il y a des années de discussions, de confrontations, de lois successives, d’expériences aussi des acteurs, et que ce n’est pas un titre aussi court qui peut dire la vérité d’un objectif politique. Si le gouvernement veut un dialogue avec les acteurs, bailleurs sociaux, élus locaux, associations de locataires, associations de solidarité, promoteurs, travailleurs sociaux… qu’il le dise et organise réellement cette concertation avec le contenu et les moyens nécessaires. Le congrès HLM se tient en septembre. Voilà qui aurait pu être l’occasion d’une vraie rencontre démocratique, d’un « Grenelle du logement » qui aurait fondé les objectifs sur une analyse partagée du bilan des politiques précédentes.

Non, le formulaire internet que ce gouvernement appelle concertation permet à tout un chacun de faire des « propositions » qui doivent tenir en quelques lignes [2] d’un formulaire dans lequel il n’est pas prévu que les élus locaux s’expriment ! C’est le règne de la pensée zapping médiatique, une idée ne doit pas être plus longue à expliquer qu’un spot publicitaire, et de l’affaiblissement démocratique, les collectivités locales et leurs élus ne servent à rien !

Mais si cette fausse concertation « numérique » est bien représentative de ce manque de sérieux du gouvernement, il est clair que le Monde a eu accès à des fuites qui en disent plus que ce qui se trouve sur le site internet du ministère de la cohésion territoriale et des territoires. Car personne n’imagine qu’un ministre va se contenter de réponses de quelques lignes à des enjeux aussi important.

D’ailleurs, toute la presse a repris l’info du Monde « Le gouvernement envisage d’assouplir l’obligation du quota de 25 % d’HLM ». Et le pire du politique est de retour. Le gouvernement répond « mais non, ce n’est pas nous, c’est le précédent gouvernement qui l’avait décidé »… et le précédent gouvernement réagit bien sûr « ce n’est pas vrai »… et chacun se renvoie la balle, sachant au fonds qu’on change de tête au gouvernement mais pas de politique…

C’est bien la précédente ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, qui avait assoupli le dispositif en permettant d’exonérer de quota obligatoire les communes d’agglomération de moins de 30.000 habitants, ainsi que les communes présentant une insuffisance des transports en commun ou des contraintes d’inconstructibilité.

Le nouveau gouvernement poursuit cette idée d’assouplir l’obligation en intégrant dans le calcul les logements intermédiaires en sus des logements sociaux. Évidemment, cela implique un loyer plus élevé. Et bien sûr, il proposera sans doute de repousser l’échéance pour donner « plus de temps » aux communes récalcitrantes.

Dans la métropole de Lyon, ceux qui sont concernés se réjouissent déjà. Renaud George, maire de Saint-Germain-aux-Monts-d ’or se ; félicite : « Cette loi (SRU) est stupide. C’est une loi couperet, qui s’applique unilatéralement à tout le monde alors que nos réalités sont bien différentes »…« Beaucoup de communes de la région ne peuvent tout simplement pas se plier à ces taux. Déjà parce que dans les Monts d’or, on a énormément d’espaces protégés sur lesquels on ne peut pas construire ». Et le premier vice-président de la métropole, Marc Grivel, maire voisin de Saint-Cyr au mont d’or, commune au revenu moyen le plus élevé de la métropole, demande une gestion des communes au cas par cas prétendant que « Parfois, ce sont les bailleurs sociaux eux-mêmes qui ne veulent pas s’implanter sur des territoires où les prix des terrains sont élevés ».

On sait que Gérard Collomb s’était fortement appuyé sur ces maires présentés comme « centristes » pour diviser la droite, et leur avait toujours fait des cadeaux comme de ne pas les embêter avec le respect de la loi SRU. Comme le dit l’ancien vice-président au logement Olivier Brachet, qui le connait si bien qu’il a finalement démissionné « on sent l’empreinte de Collomb au gouvernement, il veut revenir sur la loi Duflot »

Alors que fera le conseil des ministres du 13 Septembre qui doit évoquer une future « loi logement » ? Beaucoup dépendra des réactions des professionnels, mais aussi des locataires et des demandeurs de logement. Comme pour les APL, il faut se méfier de l’enfumage gouvernemental. Devant les réactions à la baisse de 5€ des APL, le président Macron avait dans un premier temps tenté de déminer le piège en déclarant « c’est une connerie sans nom ». Un mois plus tard, il révèle son véritable objectif en annonçant que cette baisse n’est qu’un début ! Les aides au logement représentent 17 milliards dans le budget de l’état et que le ministère des finances essaie chaque année de réduire ce montant.

Macron commence à tenter de nous convaincre qu’il va faire baisser les loyers en réduisant les aides ! Reprenant les formules « choc » de ces prédécesseurs, il dit vouloir provoquer un « choc de l’offre » en levant les obstacles qui freineraient les acteurs économiques dans la production de logement : « il faut libérer le droit de l’urbanisme, les procédures, réduire les coûts, les normes, libérer le foncier public et parapublic plus fortement en permettant de vendre à bas prix, simplifier ces règles… » On croit entendre le MEDEF qui déclairait dans une lettre aux élus en 2015 « il est urgent de stopper la machine à réglementer qui bloque l’économie, l’emploi et plombe les comptes publics. Pour libérer les énergies et le marché, à l’instar de nos demandes constantes concernant l’allègement du code du travail, il faut avoir le courage politique de simplifier de façon drastique : le code de l’environnement, le code de l’urbanisme, le code de la construction, la gouvernance habitat/urbanisme des collectivités territoriales, les rapports entre propriétaires-bailleurs et locataires. »

Comme si en laissant faire les requins du béton, on allait répondre aux attentes d’un logement de qualité accessible… ! Comme si les bailleurs avaient des marges cachées et qu’ils pourraient réduire les loyers d’un coût de baguette magique !

Non, c’est bien le prix du foncier, qui explose dans les zones tendues, et le coût de la construction, qui augmente parce-que les attentes techniques et les réglementations sont plus fortes qui sont les vrais enjeux. Il y a des efforts à faire dans l’industrialisation de la construction pour réduire les coûts, et ce devrait être le rôle de la puissance publique de développer ces efforts avec les bailleurs publics, plutôt que de laisser le marché aux grands groupes privés du bâtiment.

Ce que devrait faire le gouvernement en urgence, c’est d’augmenter fortement la mise à disposition de foncier public, de faire contribuer les rentes foncières privées au financement du foncier nécessaire au logement social, et de budgéter une véritable aide à la pierre au même niveau que les aides fiscales à la promotion privée !

Ce n’est plus le temps des promesses. Les Français commencent à juger ce gouvernement à ses actes.

Je prépare une contribution dans la consultation internet du gouvernement.. On verra bien si j’ai droit à une réponse !

[1loi de décembre 2000 relative à la solidarité et la rénovation urbaine

[2500 caractères tout compris !

Voir en ligne : L’article des échos qui annonce le projet…

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