Santé : les comptes, les malades et les soignants… Enregistrer au format PDF

la politique ne se réduit pas à l’économie
Mercredi 29 janvier 2014

J’ai eu la chance d’assister à une présentation d’un travail d’évaluation de l’hospitalisation à domicile par un laboratoire de recherche. La présentation du cas d’étude devrait être publiée à destination du grand public tellement elle démontre à quel point les politiques de santé publiques depuis 30 ans ont été conduites contre les malades et contre les soignants, détériorant la qualité de soins au profit de la sacro-sainte « maitrise des dépenses publiques », en fait la très réelle réduction des dépenses publiques remboursées, au profit des dépenses privées de ceux qui peuvent les payer.

Le constat présenté par le laboratoire est terriblement accusateur face aux discours publics :

  • il n’y a aucune corrélation entre le coût d’une action de soin à domicile et le prix payé par la sécurité sociale à l’établissement de soins. La tarification à l’acte, définie par des catégories définies par les experts ne correspond pas à une réalité concrète
  • il y a une très grande diversité d’ordonnances pour une maladie supposée identique, ce qui peut vouloir dire que les médecins sont tous fous et font n’importe quoi, ou que peut-être la situation de chaque malade peut être différente et ne peut se limiter à une catégorie standardisée, le médecin étant celui qui peut décider du traitement adapté, même si bien évidemment il doit lui-même être contrôlé
  • les critères de « recrutement » d’un malade dans un établissement de soins à domicile portent aussi sur la « rentabilité » supposée d’un cas… Si un malade présente des symptômes qui font penser que le coût des soins dépasseront largement le prix payé pour l’acte théorique, un établissement privé décidera de ne pas prendre ce malade
  • le développement de l’hospitalisation à domicile a accompagné la réduction du nombre de lits, et créé des situations humainement intolérables, quand une décision médicale oblige une famille à conserver à domicile un malade gravement atteint qu’elle ne sait pas humainement accompagner.
  • le développement des activités libérales autour de l’hôpital dans un contexte économique difficile conduit à des actes de soins de plus en plus impersonnels par des infirmiers qui pour remplir leur objectif réalisent un soin à domicile sans prendre le temps d’enlever leur veste et de parler au malade et à ses proches

Bref, ceux qui nous répètent encore et toujours qu’il faut « réduire les dépenses de santé », imposer plus de rigueur aux hôpitaux, tous ceux qui critiquent sans cesse des soignants qui seraient irresponsables économiquement, tout ceux-là organisent une dégradation continue de la qualité humaine des soins

Il est vrai que parallèlement, ils organisent le développement du secteur privé de la santé pour le développement d’offres « commerciales » pour ceux qui peuvent payer. Il suffit d’aller consulter les tarifs de chambre dans les hôpitaux privés…

Hôpital Mermoz à Lyon :

  • Chambre particulière Confort (télévision comprise) 110 €/jour
  • Option « vue sur le jardin » + 20€/jour
  • Option « garantie chambre seule » +30€/jour
  • Parking +10€/jour
  • Chambre particulière Confort +160 €/jour
  • Chambre particulière Prestige +210€/jour
  • Chambre particulière en ambulatoire (télévision comprise) 50 €/jour

Non, mesdames et messieurs Touraine, Berra, Bertrand, Bachelot, Bas, Bertrand, Douste-Blazy, Mattéi, Kouchner, Gillot pour ne prendre que les dix derniers ministres de la santé, de gauche comme de droite, une politique de la santé ne peut se réduire à l’économie de la santé, mais devrait commencer par la place du malade et sa relation aux soignants, et l’économie de la santé ne peut se réduire à la maitrise des dépenses, mais devrait d’abord porter sur la qualité du service public, de ce service public si sensible qui nous rassemble face à la douleur, la maladie, la peine.

Les soignants ne sont pas des producteurs de richesses comptabilisables, mais des humains qui construisent une relation à d’autres humains, et qui ont pour cela besoin de temps, de temps « libre » pour construire cette relation, loin de toute optimisation des processus et des actes.

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