Coups de feu et quartiers fertiles Enregistrer au format PDF

Jeudi 18 mai 2023

Ce 16 mai, les usagers et riverains de l’esplanade Jean Cagne entendent des coups de feu, les plus proches voient les faits. C’est un règlement de compte sur le point de deal à l’arrière de la maison du projet, avec un blessé, heureusement sans trop de gravité, mais touché à la nuque, et qui aurait pu être très grave. C’est le lieu où doit s’implanter le jardin participatif du « quartier fertile » engagé par la ville et la métropole.

Pour l’immense majorité des habitants, pour l’équipe municipale, c’est un coup de plus qui s’ajoute aux injustices. L’inflation bouscule des milliers de familles, les urgences sociales conduisent à une forte augmentation des besoins d’aide, et les trafics ajoutent de l’insécurité, des dégradations, des craintes pour ses enfants et adolescents. Ces derniers temps, les guerres entre trafiquants augmentent partout, révélant la vérité de ce trafic que certains croient pouvoir légaliser, c’est le comble du capitalisme sauvage, tout est permis pour faire du profit, pour prendre une part de marché.

Mais les habitués du journalisme de caniveau s’en donnent à cœur joie. Un site qu’on hésite à appeler journal titre même sur l’évènement avec une photo de voiture brulée pour faire plus crash… C’est toujours la même histoire. Ils n’ont rien à dire sur l’action contre les trafics, pour sécuriser les habitants, sur l’urgence d’un plan de santé publique pour sortir des addictions. Et bien sûr, ils n’ont rien dit de tout ce qui s’est passé d’utile, d’intéressant, de beau, d’émouvant, de joyeux, d’étonnant depuis des semaines sur ce quartier. Les vautours sont là pour faire du buzz sur les peurs.

Oui, les riverains sont inquiets, les discussions continueront longtemps, discrètement, sur l’esplanade et le mail qui est un lieu très animé par des familles et des enfants. Comment peut-on en arriver à ça ? deux hommes cagoulés tout en noir, qui viennent tirer plusieurs balles sur deux personnes dans une voiture et repartent.

Je suis passé au plus vite voir les agents qui travaillent à la maison du projet voisine, discuter avec quelques riverains. Une cellule d’écoute est mise en place avec le service prévention de la ville pour eux et des rendez-vous pourront être pris par les habitants.

J’ai discuté avec la famille du jeune blessé, un élève studieux qui peut-être n’est qu’une victime collatérale. Comment peut-on sortir de ce cycle infernal de la violence des trafics ? Comment aider les familles à protéger leurs enfants ?

Certains en profitent pour criminaliser Vénissieux, ses habitants et son équipe municipale. Oubliez-les, ce sont des vautours inutiles. Nous savons tous que ces violences sont un phénomène généralisé dans toute la France, pas seulement à Marseille ou à Saint-Denis, mais à Lyon ou Villeurbanne, comme dans de très nombreuses villes moyennes de campagne. Il faut un débat national sur les drogues, le modèle économique mondial qui s’organise avec ses circuits logistiques, de financement, ses producteurs paysans pauvres pour qui c’est la survie, et l’enjeu de santé publique d’une société qui évolue comme les USA, pays où l’overdose est une cause première de mortalité, plus que les homicides et les accidents de la route…

Mais la première réaction que doit avoir Vénissieux, c’est de refuser de se laisser assigner à l’image dégradante que propage certains, faisant comme si la ville et ses quartiers populaires se résumaient à ces trafics et leurs violences. Justement parcequ’il faut prendre avec sérieux ces drames, il faut d’abord dire qu’ils ne sont pas ce qui domine dans nos quartiers, qu’il n’effacent pas l’immense majorité qui cherche à vivre dignement, à être respecté, et à respecter les autres.

Ceux qui en « profitent » pour répéter leurs insultes aux Vénissians n’ont jamais parlé des merveilleux jeunes des EPJ des minguettes proposant un spectacle inoubliable à la médiathèque le 8 mars pour la journée des droits des femmes, ou gagnant le concours d’éloquence en préfecture, ou organisant la coopérative de services…

Ils ne connaissent pas Maïté, jeune plasticienne née à Vénissieux qui vient d’obtenir le prix de la Jeune création à la Biennale d’art contemporain de Lyon, ni Fanette, la jeune apprentie engagée au jardin de l’Envol, ni Marion qui a gagné le prix de la meilleure assistante maternelle lors de la 8e édition nationale..

Ils n’ont pas parlé des écoliers de Louis-Pergaud courant 17 tours du stade Auguste-Delaune pour financer un voyage d’études, ni des deux classes du collège Elsa-Triolet jouant au TNP de Villeurbanne, ni de l’atelier théâtral d’enfants du quartier Division-Leclerc et de leur spectacle salle Érik-Satie.

Ils ne savent rien du fantastique travail de l’association La Perche auprès de jeunes Vénissians qui permet des parcours reconnu de stand up comme celui de Djibril

Ils ne parlent pas du chanteur Moustaf, du groupe Trinix, ou de Karimouche qui a fait ses premiers pas avec Bizarre à Vénissieux. Ils n’ont rien dit des dizaines d’enfants Vénissians qui ont connu la maitrise de l’opéra et qui sont si nombreux à faire une carrière extraordinaire dans la musique ou ailleurs, nadia, sarah, romane, leila et tant d’autres…

Ne nous laissons pas submerger par les peurs, ce seraient justement la victoire des mafias. Montrons la richesse incroyable de la vie vénissiane, de la créativité et l’inventivité des vénissians, des anciennes comme des nouvelles générations.

Sur ce quartier, un projet de transformation de l’esplanade est engagée. De premières rencontres avec les habitants ont eu lieu et une après-midi est prévue le 24 mai avec des animations sur le projet, végétalisation, mobilier urbain, peintures, signalétique..

Ce sera la meilleure démonstration aux dealers que ce sont eux qui ne sont pas chez eux ici ! que le site va être réaménagé pour réaliser le jardin participatif du quartier fertile. Nos quartiers valent beaucoup plus que leurs trafics !

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