Monsieur le président, cher collègues,
pour la troisième fois, nous engageons un débat sur la situation de notre agglomération en terme de développement durable, avec un rapport qui valorise de très nombreuses actions positives, mais qui, comme nous l’avions déjà souligné en 2011, puis en 2012, passe sous silence les limites, les contradictions que ces actions révèlent et dont la prise en compte conditionne pourtant toute avancée réelle avec les habitants.
Nous l’avions illustré en 2012 par cette conférence de Doha, capitale du plus grand émetteur de carbone par habitant de la planète, pays qui interdit la distribution de tract, et connu pour ses 90% de travailleurs immigrés en quasi-esclavage.
Nous l’illustrons cette année par le classement de l’Allemagne par le réseau européen d’action pour le climat, déjà passé de la 6e à la 8e place en 2012, et qui dégringole cette année à la 19e place d’un classement intégrant pourtant non seulement les émissions, mais aussi la part d’énergie renouvelable. Les émissions allemandes sont en nette hausse. Un allemand émet deux fois plus de carbone qu’un Français ou qu’un chinois dont au passage la pays progresse rapidement dans ce classement. Mais le climat est-il réellement une priorité des grands pays développés ?
Comme l’an dernier, prenons quelques exemples qui nous concernent directement :
- Comment justifier que les « bénéficiaires » du tarif social de l’électricité payent les taxes des énergies renouvelables pour financer les propriétaires qui ont bénéficié de crédits d’impôts qu’il faut bien appeler une niche fiscale ?
- Comment résister à l’idée que la réduction des pollutions automobiles en ville passe par un péage urbain ou la maîtrise des déchets par une tarification au poids ?
- Comment parler des clauses d’insertion dans les marchés publics sans évoquer les pertes d’emplois industriels ?
- Comment évoquer des outils concrets pour réduire les inégalités sociales et ne rien dire de l’étude récente de l’INSEE qui montre que dans notre agglomération, comme dans les autres, les inégalités sociales s’aggravent ?
- Comment évoquer notre plan climat sans dire que les réalités économiques ont conduit a valider pour le réseau de chaleur de Lyon-Villeurbanne un plan qui investit trois fois plus sur le gaz que sur les énergies décarbonées ?
- Comment ne pas évoquer le CFAL Sud, repoussé aux calendes grecques par la commission mobilité 21, ce qui va bloquer pour longtemps le développement du transport passager sur cette ligne ?
Ce n’est pas une question de forme. Toutes nos actions supposent une réelle participation citoyenne. Le PIG énergie est un excellent outil. Quand des copropriétaires votent contre le projet de rénovation énergétique pourtant massivement subventionné, bien sûr, le travail se poursuit, mais nous mesurons l’importance d’associer réellement le plus grand nombre.
Il y a monsieur le président, deux manières de construire du consensus. Le consensus mou, médiatique, qui cache les problèmes sous de bons sentiments, et un consensus fort, qui se construit par l’hégémonie de l’intérêt général.
La réponse du vice-président Reppelin en commission, insistant sur la valorisation de toutes les actions conduites en disant « on ne fait pas la révolution mais », m’a remis en mémoire votre commentaire en début de mandat évoquent Bernstein critiquant Kautsky pour défendre votre choix du réformisme, choix officialisé par votre parti en 2008 dans une charte défendue par Laurent joffin sous le titre « le réformisme n’interdit pas le rêve ».
Tout le problème du développement durable, c’est bien de savoir si nous nous contentons de rêver à un autre monde, pendant que le tsunami capitaliste frappe toujours plus fort, ou si, oui ou non, nos réformes locales ouvrent un chemin de transformation sociale.
C’est pourquoi à votre citation de Bernstein déclarant toute révolution inutile, s’oppose une autre critique de Kautsky, mais une critique de gauche, dont je vous laisse le soin de deviner l’auteur, qui pour montrer que Kausky vide la révolution de son contenu en l’opposant à la démocratie, rappelle que la tentative de démocratie directe construite par la commune de Paris s’était heurté à la violence versaillaise de la semaine sanglante.
La transition énergétique ne peut être qu’un échec, comme les objectifs de Kyoto, si elle ne porte pas une vraie transformation sociale, car [1] les contradictions sociales sont au cœur du développement durable, et quand on les passe sous silence, on laisse les intérêts des puissants dominer. La formulation chinoise d’un développement harmonieux est sans doute plus pertinente car la crise permanente du capitalisme est durable mais jamais harmonieuse.
Pour rassembler de larges majorités dans ce système qui épuise le travail et la terre comme le disait Marx, il faut plus que ces réformes dont nous avons fait l’expérience après 81, ce changement ici et maintenant qui a conduit au tournant de l’austérité. Il faut au contraire des transformations profondes, pour l’intérêt général, comme l’a fait le programme du conseil national de la résistance que tant d’hommes politiques commémorent pour mieux l’enterrer.
C’est à cette échelle qu’il faut penser un développement harmonieux de notre agglomération, s’appuyant sur de larges rassemblements dépassant les clivages politiciens, sur des réformes qui portent en elles des révolutions, oui, monsieur le président, et pas qu’en rêve.
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