D’abord, si cette élection n’est pas une victoire de la gauche, c’est clairement une défaite de l’UMP dont le candidat, après cette vague bleue, fait moins de voix (58) qu’en 2001 (67), 9 voix de moins malgré les gains importants d’élus à droite ! De fait, l’UMP ne regroupe qu’à peine ses propres élus et a été isolée massivement par les élus divers droite et UDI.
Il ne s’agit pas vraiment d’une nouveauté ! Rappelons-nous l’annonce surprise par Michel Mercier et Gérard Collomb de la création de la métropole fin 2012 ! Même le premier vice-président du Grand Lyon, pourtant chargé de cette métropole, n’avait pas été informé ! [1]. Certains ont vu dans cette annonce, une alliance conjoncturelle entre deux personnalités, sur un projet commun, sans autres conséquences politiques.
Mais les relations entre le PS et l’UDI au conseil général montraient au contraire une situation qui n’est plus l’opposition classique gauche droite. En 2008, le PS avait déjà tenté de convaincre quelques divers droite de constituer une majorité au conseil général de même type que dans la communauté. Et en 2012 et 2013, les élus socialistes n’ont pas voté contre le budget de Michel Mercier, ce qui est la posture politique traditionnelle d’une opposition. Ils n’ont pas pris part au vote, considérant que le budget était l’affaire de la majorité (!), même quand ce budget comportait une hausse de 16% des impôts fonciers ! Seuls d’ailleurs, les élus communistes s’y sont opposés.
La situation politique Lyonnaise est donc de plus en plus marquée par l’émergence d’une nouvelle majorité, transcendant le clivage traditionnel gauche-droite, et construite autour d’une alliance solide entre le PS et l’UDI, symbolisée par la connivence entre Michel Mercier et Gérard Collomb. C’est ce que montre l’élection de Gérard Collomb avec plus d’un quart de voix venant des divers droite et de l’UDI.
Cette situation marquait bien entendu la majorité précédente de Gérard Collomb. Mais cette majorité large semblait légitimée par la nature de la communauté urbaine, une « inter-communalité »’ dans laquelle les élus représentent tout autant leur ville que leur parti politique. Gérard Collomb avait d’ailleurs été élu en 2008 avec 117 voix et l’abstention de l’UMP qui n’avait pas présenté de candidat. La gauche avec 82 élus sur 156, était majoritaire, mais le rassemblement constitué par Gérard Collomb débordait largement à droite, au delà des 23 voix du centre (Synergies), ce qui conduisait à un exécutif associant 3 élus de l’UMP et 4 de l’UDI.
Mais la future métropole sera une collectivité pleine et entière, et en 2020, les conseillers communautaires seront élus dans des circonscriptions indépendantes des communes, et donc sur une base totalement liée aux accords entre partis politiques. L’annonce de la métropole Lyonnaise a précédé et accéléré la loi qui conduit aujourd’hui à la suppression des départements, à la généralisation de collectivités spéciales avec chacune son statut (bonjour la simplification administrative !). La majorité de 2014 constituée par Gérard Collomb est-elle la préfiguration d’une majorité PS UDI demain au niveau national ? Qui va voter le plan Vals de réduction massive des dépenses publiques au parlement ? qui votera demain un budget du Grand Lyon traduction du pacte de responsabilité gouvernemental ?
Les élus communistes et Front de Gauche qui se sont abstenu lors de l’élection du président ont révélé la nécessité de dire la vérité sur la majorité politique de Gérard Collomb. Il est essentiel qu’un groupe d’élus communistes au Grand Lyon puisse prendre position sur chaque projet dans la clarté, sur la seule base de l’intérêt général.
Car la crise politique, la crise institutionnelle, l’abstention massive, la désespérance sociale, rendent urgente la reconstruction d’une perspective politique d’un vrai changement face au chacun pour soi, aux discours racistes et violents qui visent à diviser le peuple, à proposer des boucs émissaires pour que la question d’une autre société ne soit pas posée. Une majorité PS UDI aggraverait cette crise politique, et au final la dérive droitière de la vie politique Française, même si elle permet à des institutions loin du peuple de se maintenir.
Il n’y a aucune issue dans le retour en arrière à ce vieux clivage politicien d’une gauche et d’une droite dont tout le monde sait qu’elles font la même politique économique nationale. L’union de la gauche née avec le programme commun pour rassembler des forces politiques tournées vers le changement est derrière nous. Le plan Vals symbolise l’aboutissement de l’aggiornamento socialiste qui en fait aujourd’hui non plus le parti réformiste du monde du travail, mais le parti démocrate des couches aisées urbaines.
Il faut reconstruire des rassemblements larges, sur le terrain, avec toutes les forces politiques républicaines, mais sur un contenu clair, celui de la défense d’une conception républicaine de la citoyenneté, de la solidarité, des coopérations internationales, celui que symbolisait si bien le programme « les jours heureux » du conseil national de la résistance. Cela ne peut se faire que dans la rupture avec les discours de la concurrence, de la réduction du coût du travail, de la réduction des dépenses publiques, d’une mondialisation organisée comme une guerre économique généralisée.
Cela nécessite que des voix, de gauche comme de droite, s’élèvent pour critiquer une métropole de la concurrence, une métropole centralisée priorisant les grands projets sur la proximité et la réponse aux besoins des habitants. Cela suppose que les discussions sur le futur « pacte métropolitain » fasse une large place aux projets des communes. Cela suppose de stopper la dérive technocratique métropolitaine, de cesser de considérer que les seuls penseurs et décideurs sont à Lyon, et de faire bouger les rapports entre communes et communauté, au profit des communes.
Les élus communistes ont une responsabilité importante pour porter une telle perspective, ouvert au dialogue avec tous mais en refusant les discours consensuels que tant d’électeurs rejettent par instinct. Pour reconstruire le lien politique entre la grande majorité du peuple et des institutions républicaines a renouveler, il faut dire la vérité sur les contradictions, tout en agissant avec le plus grand nombre sur des dossiers concrets.
C’est ce que portait avec clarté le nom de la campagne de Michèle Picard à Vénissieux, slogan qui pourrait s’appliquer aux élus communistes du Grand Lyon « Rassembler les habitants pour tenir le cap à gauche ! »
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