Il portait l’utopie d’un urbanisme fait par et pour les travailleurs Enregistrer au format PDF

Jeudi 2 janvier 2025

En ce dernier jour de l’année, notre camarade et ami Henri Thivillier a été emporté par une maladie qu’il n’avait pas vu venir, une infection foudroyante qui l’a contraint à un coma dont il n’a pu sortir. Il doit être furieux de ne pas avoir organisé la suite, lui qui a tant organisé, réuni, créé dans une vie de militant, de responsable politique, d’élu. Il a tant fait. Architecte dont les amis connaissent les traces dans Vénissieux et ailleurs, dirigeant de la SACOVIV, adjoint à l’urbanisme de André Gerin animateur du « grand bond en avant » des années 2000, puis de Michèle Picard acteur d’une transformation urbaine maîtrisée, conseiller communautaire de l’ère Collomb connu pour son regard critique aiguisé mais toujours au service du rassemblement le plus à gauche possible. Il décide en 2014 de laisser la place, mais poursuit son engagement public comme délégué de quartier, mais aussi au CERTA, ce centre de formation professionnelle vénissian qui donne sa chance aux jeunes les plus « éloignés de l’emploi », comme le disent les statistiques.

Il faut penser à ses filles, ses proches, celles qui l’ont aimé. Il nous semblait si solide. Il y a quelques années, on l’avait emmené aux urgences après une chute, du sang dans le cerveau dont il s’était remis, nous expliquant ensuite que la cause était sans doute une poutre maîtresse qui lui était tombé sur la tête dans son chantier de la maison familiale en Haute-Loire qu’il retapait… Un chantier incroyable dans une vieille bâtisse en pierre dont il refaisait tout seul la charpente, le chauffage, l’électricité, l’aménagement complet, et d’y installer son petit train immense, un rêve fou à transmettre aux petits-enfants.

Il était autant une personnalité aimée et reconnue de Vénissieux et de l’agglomération qu’un pilier de ce village de Haute-Loire à la vie sociale surprenante, entre expositions de photos, dessins, et histoires locales. Une démocratie locale à petite échelle, une forme de « communisme primitif » qu’il aimait faire connaître.

Mais c’est à Vénissieux que son engagement communiste avait pris toute son ampleur, porteur autant de la nécessaire intervention politique de ceux qui travaillent, de la solidarité avec les grandes luttes ouvrières, que du travail avec les ingénieurs, entrepreneurs et investisseurs qui était nombreux à l’apprécier comme adjoint à l’urbanisme et à l’économie, aux compétences politiques et techniques reconnues.

C’est à Vénissieux qu’il laisse un héritage politique majeur d’architecte et d’urbanisme, dans la rénovation urbaine des minguettes, dans l’allée des Savoies devenu un lieu attractif des filières automobiles, dans les premières étapes d’un projet de cœur de ville dépassant l’ancien village, de la gare à la médiathèque, cette médiathèque symbole de son ambition pour Vénissieux, un geste architectural, culturel et social de premier plan, un geste politique qui porte indissociablement son engagement de communiste et d’urbaniste.

Il a formé et accompagné de nombreux élus vénissians, expliquant autant la nécessité de l’enracinement militant que du besoin d’expertise à chercher auprès des professionnels. Je lui ai souvent demandé son avis, et je garde son message essentiel : « prenez le temps d’écouter la diversité de ceux qui ont une connaissance utile d’un dossier, dans les usages, comme dans les techniques, et prenez le temps d’échanger avec tous, pour construire des solutions qui rassemblent, sans jamais perdre nos objectifs politiques »

Il travaillait comme délégué de quartier à faire vivre en pratique son utopie d’ateliers d’urbanisme participatif, impliquant le maximum d’habitants pour dessiner ensemble la ville, parce qu’il avait enraciné en lui l’utopie communiste d’une société débarrassée de toute aliénation où chacun peut devenir dirigeant, où chacun peut participer à construire une ville par et pour les travailleurs.

C’est avec un drapeau rouge au cœur que nous serons nombreux à l’accompagner et que nous poursuivrons ses combats.

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