Sur le fonds, nous soutenons ce projet d’un institut culturel qui fasse connaitre des cultures diverses et qui ont des liens étroits avec notre propre histoire, car le débat sur la place des religions dans la société et donc sur la laïcité, a besoin de connaissances historiques, philosophiques, sociologiques, culturelles sur les réalités diverses des religions en général et des religions de l’islam en particulier.
Justement parce que les terroristes qui sont pour nous avant tout des fascistes utilisent l’islam pour diviser les peuples, et d’abord les peuples d’histoire musulmane, il est essentiel de favoriser la connaissance des cultures, face à ceux qui de tout coté tentent de faire vivre le « choc des civilisations » comme les guerres entre courants de l’islam. La république laïque ne reconnait ni ne salarie aucun culte, car elle doit assurer la liberté de tous les cultes. Elle doit donc les connaitre et est légitime à favoriser des équipements culturels qui aident à comprendre la place des religions dans les cultures humaines ; ce qui justifie aussi à Lyon le musée du christianisme ou l’institut Hillel pour la culture juive, qui ont fait l’objet d’aides publiques.
Mais nous voudrions en savoir plus sur le contenu du projet, ses partenariats scientifiques et culturels. Car il doit porter la diversité des courants de l’islam, qui n’est pas une religion unie, mais un ensemble de courants, sunnites, chiites, soufis, alaouites, alevis… et cette diversité religieuse est trop souvent utilisée par les porteurs de guerre. Evidemment, cet institut ne peut effacer ces divisions, mais comment pourra-t-il faire connaitre cette diversité pour aider chacun, à la comprendre ?
Il doit aussi porter la diversité des cultures de l’islam, arabe, mais aussi maghrébine, africaine, berbère, égyptienne, perse, turque, asiatique. Nous ne pensons pas qu’il existe une civilisation de l’islam, tout comme nous ne pensons pas qu’il existe une civilisation du christianisme, mais comme pour toutes les religions, des cultures, nombreuses qui se sont développés avec cette religion, mais qui ne s’y résument pas. Et si on parle bien d’une civilisation méditerranéenne avec la mer, le blé, les olives et la vigne, elle s’est exprimée dans les trois religions du livre et de manière diverse selon les siècles
Beaucoup d’interventions ont évoqué la nécessité de la reconnaissance des cultures pour isoler l’intégrisme terroriste, comme s’il était un problème culturel ou religieux. Si nous parlons d’un « fascisme islamiste », c’est bien pour souligner que ses racines sont d’abord dans la crise sociale et économique, et la violence qu’elle génère notamment chez des jeunes qui ne trouvent d’autre accomplissement qu’un nihilisme destructeur. Comme dans les années 30, ces milices fascistes exploitent les dérives individuelles de ceux qui pour dénoncer le système ont besoin de victimes contre qui exercer leur violence. La religion n’est bien que le support de cette dérive et pas la cause. Aucun débat culturel ou religieux ne peut réduire ni cette attirance ni cette propagande au djihad. L’islam républicain ne peut réduire seul l’impact des propagandes intégristes. C’est le combat social pour l’égalité et la bataille idéologique pour faire percevoir à quel point le fascisme est toujours un dérivatif pour que les peuples ne s’unissent pas contre la domination des oligarchies. Ce combat doit permettre d’expliquer comment des jeunes en rupture dans une société mondialisée peuvent se transformer en soldats dociles d’oligarques du pétrole.
Nous avons appris en séance que la gouvernance de cet institut sera pluripartite, avec deux collèges de 11 personnes, le premier représentant les collectivités financeurs avec des élus lyonnais et métropolitains, des universitaires. Il nous semble que l’enjeu de cet institut est bien d’agglomération et cela devrait clairement apparaitre dans la gouvernance. D’ailleurs nous pensons que cet institut travaillera avec les communautés musulmanes de toute l’agglomération. Nos camarades musulmans à Villeurbanne, Vaulx, Bron ou Vénissieux nous témoigne tous de leur intérêt pour ce projet et en même temps de leur questionnement sur la place de tous dans cet institut.
Cependant, nous constatons une nouvelle fois que l’état français joue un jeu bien peu républicain dans les relations avec des pays étrangers, et on peut se demander ce que le ministère des affaires étrangères a pu discuter avec l’Algérie ou l’Arabie Saoudite pour ces financements. On nous dit qu’ils sont gérés par la caisse des dépôts et sans contrepartie sur le projet, mais nous ne croyons pas qu’ils soient sans contrepartie en terme de politique étrangère, et comme les rapports de la France avec l’Arabie saoudite sont marquée avec Sarkozy comme avec Hollande par une terrible complicité dans les guerres du moyen-orient, nous ne pouvons qu’être très interrogatif.
Ce n’est pas uniquement aux acteurs du culte musulman de rejeter l’intégrisme et de le faire reculer dans les représentations idéologiques qui ont effectivement progressé ces dernières années. C’est un défi politique pour toutes les forces sociales, culturelles et politiques, et chacune doit prendre ses responsabilités, en premier lieu les forces gouvernementales qui doivent lever beaucoup d’ambiguïtés dans leurs relations internationales.
Et nous n’oublions jamais que si cet institut comme d’autres peut jouer un rôle important dans la connaissance et la rencontre des cultures, c’est bien à l’école publique, l’école pour tous, que se joue une part décisive de la construction des chemins de vie des jeunes. La réussite scolaire, la solidarité, l’action collective contre les injustices, sont les antidotes les plus puissants contre les intégrismes.
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