Journée mondiale d’action pour le climat

Ce n’est pas le climat qu’il faut changer, c’est le système ! Enregistrer au format PDF

Samedi 8 septembre 2018

La journée mondiale d’action pour le climat ce 8 septembre pourrait être l’occasion de tirer les leçons d’un constat dérangeant mais pourtant bien réel. Tous les discours politiques sur le climat n’ont pas empêché que les émissions mondiales de gaz à effet de serre sont reparties à la hausse, en France aussi en 2017. Pourtant il y a 3 ans à la COP21 de Paris, les dirigeants du monde se congratulaient en annonçant un nouvel objectif de limitation de la hausse de température à 1,5°C, Laurent Fabius pleurait de joie devant le succès de « sa » COP21…

La plupart des climatologues soulignaient déjà que la COP21 ne se concluait que sur des promesses et aucun engagement, que la suite des accords de Kyoto n’étaient toujours pas signée par les états, et que l’objectif de 1,5°C était totalement irréaliste… Ils avaient raison. Les émissions mondiales sont en nette hausse avec un nouveau record en 2017 et on craint aujourd’hui plutôt que le réchauffement ne dépasse au final les 4°C !

Non l’éolien et le photovoltaïque ne feront pas la société bas carbone !

En France en 2017, pour la troisième année consécutive, les émissions de CO2 sont à la hausse, notamment pour la production électrique. En janvier 2017 la vague de froid a été clairement compensée par le gaz, l’hydraulique et l’import d’électricité. L’éolien était à son plus bas.

En Allemagne, 2017 confirme que pour la transition énergétique électrique en Allemagne… la sortie du carbone reste à faire !. La production électrique fossile (gaz, charbon, fuel, lignite) représente toujours plus de 50% du total. Elle a certes baissé en 2017 grâce à une meilleure utilisation des capacités renouvelables [1], mais ce taux d’utilisation reste dépendant… du vent. De fait, la forte progression des ENR remplace principalement du nucléaire, et ces investissements considérables ne permettent de ne réduire que très faiblement la production électrique fossile. De plus, les logiques marchandes conduisent à des situations spéculatives sur les marchés « spot » de l’électricité et des aberrations comme les prix négatifs ou l’obligation de consommation pour absorber les surproductions intermittentes. Le résultat est une facture pour un allemand du double de celle d’un Français, pour une émission carbonée elle aussi du double, et en faible réduction. Tout le monde reconnait en Allemagne que l’objectif de la transition "EnergieWende" d’une réduction de 40% des émissions carbonées ne sera pas atteint, et de loin.

Autrement dit, il est de plus en plus évident que le développement accéléré de l’éolien et du photovoltaïque ne permettra pas cette transition vers une société bas carbone. L’Allemagne a déjà investi dans 113GW de puissance électrique ENR, presque le double de la puissance installée en nucléaire en France, et son électricité continue à émettre deux fois plus de carbone que l’électricité Française ! Mais il faut noter que désormais en Allemagne, les plus grands lobbys économiques sont ceux de l’éolien ! A plus petite échelle, cela se confirme en France quand la baisse de la production nucléaire contraint à augmenter la production fossile ou les importations.

Remettre en question la loi de transition énergétique de 2016

Pourtant, le discours dominant reste celui de la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2016, loi issue de l’accord politique entre le parti socialiste et les verts en 2012, bien que la situation politique soit totalement différente.

Les associations qui appellent justement les citoyens à se mobiliser pour le climat ce 8 septembre ont bien raison de déclarer « Ensemble, exigeons de nos élus et institutions locales un véritable engagement pour la lutte contre le réchauffement climatique global et un avenir sans énergie fossile. », mais la plupart continuent de demander « une transition rapide et juste vers une énergie 100 % renouvelable, et le refus de tout nouveau projet de combustibles fossiles. » sans réaliser l’impasse de ce discours du 100% renouvelable pour la réduction des émissions carbonées.

Et pourquoi donc ne lancer cet appel qu’aux élus locaux et pas aux parlementaires et au gouvernement ? On comprend bien pour les états-uniens que l’appel à Trump soit écarté, mais pourquoi laisser tranquille nos députés et sénateurs, et même le président Macron qui affirme qu’il continue dans la même orientation sans Nicolas Hulot ?

Il est de plus en plus urgent de rouvrir en grand et à partir de l’expérience le débat public sur la transition énergétique. Non, l’enjeu n’est pas d’abord un choix de techniques, mais d’abord un choix politique de société, au fonds un choix entre le service public et le marché. Comme le disent beaucoup de militants, « ce n’est pas le climat qu’il faut changer, c’est le système », ou comme l’avait dit Hugo Chavez à la COP de Copenhague « si le climat était une banque, ils l’auraient déjà sauvé ».

Ce n’est pas en "régulant" les marchés de l’énergie qu’on réduira massivement le contenu carbone de la production électrique. Même avec une taxation carbone élevée, le gaz est la technique la plus souple et la moins chère pour un investisseur. Même avec des incitations très fortes que le consommateur paie lourdement, chaque gigawatt éolien ou photovoltaïque a besoin d’un complément gaz pour gérer l’intermittence…

Ce n’est pas en "régulant" les investissements énergétiques qu’on réduira massivement le contenu carbone des déplacements ou du logement. C’est au contraire en affirmant une politique publique massive, un véritable "plan marshall" de la transition énergétique qu’on pourra envoyer le fret marchandise sur le rail, remplacer les mobilités pendulaires des métropoles par des liaisons rails cadencées denses, inventer une mobilité urbaine remplaçant la voiture thermique individuelle. Le "plan chaleur" est un exemple positif de l’effort pour les réhabilitations thermiques et la question qui devrait être en débat serait de le multiplier fortement pour accélérer la transition énergétique du logement.

Une campagne pour le désinvestissement du fossile… ?

Or, des élus et forces politiques font connaitre la campagne « de désinvestissement des secteurs contribuant au changement climatique » initiée par 350.org et relayée par de nombreuses associations. Il faudrait que les collectivités impose aux caisses de retraite de fonctionnaires, aux banques partenaires de la collectivité de ne plus travailler avec les entreprises reposant sur des fossiles. Il s’agirait de « se désinvestir » des énergies fossiles.

Mais cette campagne très médiatique repose sur l’hypothèse que le développement de l’électricité éolienne et photovoltaïque, accompagnant les efforts d’efficience énergétique des usages, permettra le remplacement rapide des énergies fossiles (charbon et gaz). Or, tout nous montre que ce ne sera pas le cas !

De plus, c’est une campagne pensée dans un cadre économique anglo-saxon, qui ne connait pas le service public, la retraite par répartition et réduit le rôle de l’état au régulateur en économie, sans considérer sa capacité à agir lui-même, investir, et même interdire !

L’exemple le plus frappant est l’appel à agir auprès des caisses de retraite. Dans un monde aglo-saxon de retraite par capitalisation, cette demande peut avoir du sens, les caisses de retraite US ou UK sont de grands fonds financiers qui jouent un rôle clé à la bourse. Mais nous défendons une autre conception de la retraite, comme un droit financé par la solidarité des actifs, la répartition des cotisations, et non pas par la capitalisation des futurs retraités. Dans ces conditions, nous dénonçons l’évolution qui conduit de trop nombreuses caisses de retraites à se transformer en investisseur pour chercher des revenus financiers venant contribuer au financement des retraites. Nous ne pouvons donc demander d’orienter les investissements des caisses de retraites puisque nous leur demandons de ne pas jouer le rôle d’investisseur, mais de répartir l’argent des cotisations sociales directement auprès des retraités sans jouer avec ce qui est leur argent.

De fait, cette campagne contribue à la confusion entretenue autour de l’action contre le changement climatique et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le débat citoyen sur le changement climatique ne peut reposer sur des slogans mais faire appel à l’intelligence collective pour rechercher dans toutes les politiques publiques les actions qui conduisent réellement à une réduction des émissions de gaz à effet de serre.

En fait, cette campagne repose sur l’illusion qu’on peut changer notre impact sur le climat sans changer de système économique, qu’il suffirait de réguler le marché des capitaux pour l’orienter vers les énergies renouvelables et quitter les énergies fossiles, pour obtenir enfin la réduction des émissions. Il faut au contraire réduire les logiques capitalistes dans les infrastructures énergétique, redonner plus de poids et de place aux politiques publiques et aux services publics.

Et la métropole de Lyon ?

D’autre part, il serait très étonnant de voir des élus métropolitains demander que la métropole intervienne auprès des caisses de retraite et des banques sans même commencer par étudier les investissements directs ou délégués de la métropole elle-même ! Le groupe communiste, parti de gauche et républicain a été le seul à demander que la métropole augmente ses objectifs de part ENR du contrat de réseau de chaleur urbain afin de réduire les investissement gaz prévus, trois fois plus de puissance gaz que de puissance biomasse ! De même, il est intervenu pour demander que le plan mobilité change de braquet pour la part modale des transports en commun afin de réduire plus rapidement les consommations fossiles des transports. De même, il est intervenu pour demander le développement rapide du rail dans les mobilités interurbaines avec des liaisons cadencées permettant enfin de réduire les flux sur le périphérique et les grandes infrastructures routières. Un programme de transformation rapide des motorisations des véhicules de la collecte ou du nettoiement vers des solutions non fossiles irait dans le même sens. C’est déha engagé par les prestataires de la partie privée de la collecte.

Comment pourrions-nous dans un vœu sur le rôle de la métropole dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre faire abstraction de ses compétences propres ?

La bataille publique dans l’agglomération devrait, à partir du constat renouvelé en 2018 du changement climatique, engager la métropole dans une accélération de son plan climat, en fixant de nouveaux objectifs, plus ambitieux et traduits par des actions renforcées et un niveau d’investissement plus élevé dans des actions de réduction des émissions carbonées.

[1avec une augmentation de capacité de 8% l’augmentation de production est de 14%

Vos commentaires

  • Le 10 septembre 2018 à 10:11, par Sylviemateo69200 En réponse à : Ce n’est pas le climat qu’il faut changer, c’est le système !

    ce n’est pas un hasard si samedi après midi il y avait beaucoup de monde dont de nombreux jeunes place des terreaux à lyon dont je faisais parti pour manifester contre le réchauffement climatique Suite à la démission de nicolas hulot et surtout la phrase politique qu’il a prononcé je suis seul je n’ai pas de troupes avec moi a déclenché un formidable élan de solidarité un jeune journaliste bloggueur en a profité pour lancé un appel aux rassemblement du week-end relayé par d’autres bloggeurs et connaitre ensuite le succès de ces marches citoyennes Bien évidemment les élus locaux ont la possibilité et doivent à leur niveau faire remonter aux pouvoir publique les grandes difficultés concrètes auxquelles ils se heurtent manque de moyens financiers mais aussi pression de lobbys d’entreprises mais aussi d’habitants mal informé ou individualiste et non soucieux de l’intérêt général humain pour conclure soyons très actif sur ces thématiques car comme on l’observe l’opinion publique y est très sensible pierre mateo

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