Comment déconfiner en sécurité ? Enregistrer au format PDF

Samedi 2 mai 2020

Les retards et les confusions dans l’action gouvernementale au début de l’épidémie ont aggravé une crise de confiance ancienne entre beaucoup de français et les institutions. Les errements des discours gouvernementaux sur l’épidémie n’ont pas aidé. Si le gouvernement a finalement pris des mesures fortes pour protéger les Français de l’épidémie, il n’a pas pu s’empêcher de prioriser d’abord les entreprises et de dérèglementer encore plus le droit du travail. C’est sans doute une des raisons pour laquelle il n’a pas reconstruit de lien de confiance et cela pèse sur les réactions à son plan de déconfinement.

L’annonce d’un déconfinement progressif a partir du 11 mai aurait pu être une bonne nouvelle pour des français dont beaucoup vivent difficilement ce confinement contraint et très inégal. Les familles nombreuses dans un logement étroit, les travailleurs avec des revenus en baisse, parfois lourdement, les parents d’enfants qui perdent le lien avec les références scolaires, les jeunes qui ne supportent pas l’enfermement familial, tous auraient pu se réjouir de la sortie de ces contraintes !

Macron a fixé une date sans réponses concrètes aux questions que se posent légitimement les habitants, et les annonces gouvernementales qui ont suivies laissent beaucoup d’incertitudes, jusqu’à cette carte des départements dont on apprend le lendemain de sa publication qu’elle comportait 9 erreurs…

Qui pourra être testé et comment ? Beaucoup de Français font l’expérience quand ils sont des signes de maladie que leur médecin ne leur donne pas d’ordonnance pour faire un test. Théoriquement, à partir du 11 mai, cela devrait être systématique, mais les laboratoires ont-ils la capacité ? Le gouvernement parle de 700 000 tests par semaine, ce qui pour Vénissieux représenterait 700 tests, donc 120 par jour sur 6 jours… Or actuellement, seul l’hôpital portes du sud les réalise avec un rendez-vous tous les quart d’heure… soit au mieux 50 tests pas jour ! On comprend l’impatience de ceux qui se sont rués sur les annonces de « drive » générant des bousculades comme dans les grandes surfaces les premiers jours de confinement, mais cette organisation anarchique où chacun tente de tirer la couverture à soi est le contraire de ce dont nous avons besoin pour être efficace et… donc confiant ! C’est à l’état de dire clairement combien de tests chaque laboratoire doit réaliser et pour quel territoire.

Qui aura des masques et comment ? Il y a encore des soignants ou des travailleurs de première ligne qui ont des difficultés à avoir des masques respectant la consigne des 4 heures. Beaucoup d’entreprises se sont lancés dans la production, mais les prix se sont parfois envolés ! Vénissieux a pris les devant avec le réseau de couturière solidaires qui a permis d’envoyer un masque tissu aux plus de 65 ans, à fournir les associations, foyers et résidences… Mais les commandes de 70 000 masques de la ville, comme celles de la métropole, comme celles de la région… ne seront pas livrées avant le 11 mai ! Et personne n’organise la cohérence du réseau de distribution au plan national ! C’est un marché avec la célèbre « concurrence libre et non faussée », qui décide qui sera servi et dans quel ordre !

Comment peut-on isoler les personnes positives au covid ? Comment identifier leurs contacts à risque ? La stratégie présentée par le gouvernement peut se comprendre. Identifier les porteurs du virus, contacter leurs proches et isoler les malades pour freiner la propagation. C’est ce qu’a fait dès le début le Vietnam, ce pays pauvre mais socialiste qui a organisé un porte à porte géant pour voir tous les habitants, prendre leur température, les tester dans la mesure de ses moyens, et organiser l’isolement des personnes à risque. Mais cela suppose de se faire confiance ! Actuellement, des malades préfèrent ne pas prévenir leurs voisins, un peu comme avec les punaises de lit, et qui va demander à un malade de donner la liste de tous ceux qu’il a rencontré depuis 5 ou 6 jours ?

Le gouvernement parle de « brigades sanitaires ». Le terme est peut-être mal choisi, mais l’idée est bonne si ces brigades sont organisées à partir des réseaux de soignants, en mobilisant des citoyens qui doivent être formés. Pour l’instant, tout est flou, et au niveau d’une commune, on ne sait rien de ces brigades… moins de 10 jours avant leur mise en place !

Et comme on ne sait rien encore de la mobilisation de l’hôtellerie, on se dit que le gouvernement va privilégier l’isolement « à domicile », pour mettre en quarantaine les malades. Ce sera encore l’inégalité qui dominera, les plus riches dans leur résidence secondaire ou se payant l’hôtel, et la majorité devant se contenter d’un isolement à domicile… donc avec le partage familial du virus !

Le déconfinement a commencé, nous voulons le réussir en sécurité !

Si on peut comprendre les craintes du déconfinement, toutes ces questions ne changent pas un mouvement déjà engagé. Il y a de plus en plus de monde dans la rue, de plus en plus de travailleurs qui reprennent, volontairement ou pas, leur travail. Cela se voit sur la circulation, dans notre quartier, comme dans les grands axes, le boulevard urbain sud, le périphérique… (voir à ce sujet mon article sur la mobilité pendant le déconfinement)

Il est certains que beaucoup de ceux qui le peuvent vont prolonger le confinement, tant mieux ! Cela donne du temps pour adapter progressivement nos comportements à cette situation… vivre avec le virus. Nous n’avons pas le choix, car le virus sera toujours là en septembre, et dans un an… Au mieux, un vaccin arrivera à l’été 2021, et provoquera peut-être l’extinction de ce virus en 2022… sachant qu’il peut aussi comme la grippe se transformer pour revenir dans une autre variante…

Il est donc urgent d’avoir les moyens publics pour tester immédiatement tout le monde, et isoler un porteur, autant pour le soigner que pour protéger ses proches. Ce devrait être le premier des « plans de relance » du gouvernement et cela suppose clairement un véritable service public de la santé pour tous, présent partout, avec les moyens d’accueillir en sécurité une nouvelle « vague » épidémique. Il faut donc inverser toutes les politiques publiques de suppression de lits dans les hopitaux, de fermetures de centres de soins, de délocalisation des industries de la santé…

Et nous pouvons réussir cette « vie avec le virus ». Il n’y a aucune raison de sombrer dans le catastrophisme. Car si ce virus est dangereux, avec un taux de mortalité bien supérieur à celui de la grippe, son impact sur la mortalité totale reste très faible, dans notre pays qui a tardé à réagir !

Le site des données du gouvernement publie la liste des décès en France. J’ai réalité à partir de cette liste un graphique comparant l’année de la canicule en 2003, les 5 dernières années de 2015 à 2019, avec l’année 2020 encours. On ne connait pas encore les chiffres d’avril, mais le résultat semble clair. Si nous gérons correctement le déconfinement, cette épidémie n’aura pas plus d’impact que la canicule de 2003 [1]

On découvre au passage que la mortalité en France a tendance à augmenter depuis 10 ans. Ce ne sont pas les virus qui sont en cause, mais sans doute la dégradation des conditions de vie et de santé… Voila ce qui devrait nous mobiliser pour inverser les politiques gouvernementales et conforter tous nos services publics !

Je mettrai à jour le graphique avec les données d’avril dès qu’elles seront disponibles…

[1je sais que ce constat peut étonner… mais quand on parle de 20 000 morts du COVID, il ne faut pas oublier qu’il y a en France en moyenne 50 000 décès par mois

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