1. Le leurre du « Dégage ! » : changer de président ne suffit pas
Certains nous disent dégage Macron, dégage Bayrou, et maintenant, dégage Lecornu.
Mais on a dégagé Chirac, puis on a dégagé Sarkozy, puis on a dégagé Hollande, et Macron va dégager de toute façon. Et ça change quoi ? Est- ce que le problème commence à l’Elysée ? à Matignon ? C’est se mentir ou se raconter des des histoires. Chaque "dégage" laisse place à un nouveau visage, jamais à un vrai changement. Pourquoi ? Parce que le problème ne se situe pas d’abord dans les palais de la République, parce que le vrai pouvoir n’est pas à l’Élysée mais dans les mains d’une classe sociale qui dirige l’économie, possède les médias et façonne la politique depuis des décennies : le patronat.
C’est ce qu’on dit dans les manifs CGT : « C’est pas à l’Élysée, c’est pas à Matignon, c’est pas dans les salons qu’on obtiendra satisfaction. » La lutte doit se situer d’abord là où se jouent les rapports de force économiques et sociaux, dans l’entreprise.
Admettons que Mélenchon puisse être élu, ce qui est un peu douteux, mais il ferait quoi devant la finance, devant les banques ? Il capitulerait comme Mitterrand en 1983 ? Il dit que non. Mais il ne suffit pas de le dire, et qui peut croire que ce n’est qu’une question de personne ? L’insoumis Tsipras avait juré… Et il a tourné sa veste devant la troika de la finance. L’insoumis Boric au Chili avait beaucoup promis en 2022, pour quel résultat ? En 1973, Allende, au Chili, n’avait pas tourné sa veste, mais il s’est fait bombarder par l’armée US. Comme le dit avec un grand sourire l’ambassadeur US interviewé dans l’excellent film Allende « vous ne croyez quand même pas que la bourgeoisie allait se suicider dans la joie » ?
2. La désindustrialisation : un crime de classe
On nous a souvent répété que la Chine « nous a volé nos usines ». C’est Faux. Ce sont les patrons français qui ont délocalisé, vendu, démantelé l’appareil productif, espérant des profits immédiats. Résultat : la France ne produit plus. Dans les années 1980, elle construisait plusieurs centrales nucléaires par an. Aujourd’hui, elle peine à achever un EPR en quinze ans.
La désindustrialisation n’est pas qu’une question de chiffres. C’est une destruction des savoir-faire, des métiers, des compétences, donc des capacités à faire.** Exemple frappant : dans le Nord, la grande Giga-factory de batteries peine à produire, une batterie sur deux est rejetée en fin de chaîne. Le patron est obligé d’aller chercher des ingénieurs et techniciens chinois pour maîtriser le process… Pourquoi ? Parce qu’on a perdu les ouvriers, les techniciens, les ingénieurs capables de maîtriser des processus industriels complexes.
Pendant 30 ans, ils nous ont raconté des balivernes. Ils nous ont parlé de l’entreprise sans usine. Ils nous ont parlé de la destruction créatrice, une formule utilisée par le socialiste Gérard Collomb au conseil de métropole pour justifier l’accompagnement des restructurations d’usines. En résumé, il faut que le vieux meurt pour que le nouveau arrive. Mais c’est une connerie. Plus on détruit les usines, les structures, les économies, plus on détruit les savoir-faire. Or la vraie valeur d’une économie, ce sont les savoir-faire. C’est sa capacité à faire.
Mais les écoles d’ingénieurs forment désormais des financiers, des logisticiens, des experts en supply chain… Plus des bâtisseurs. En 1960, un ingénieur des Mines apprenait à construire des centrales nucléaires. En 2025, il apprend à optimiser des flux financiers.
3. La dette, conséquence de la désindustrialisation
La dette publique est souvent brandie comme un épouvantail. Mais d’où vient-elle ? Bien sûr de l’évasion fiscale des plus riches, de la baisse de la fiscalité sur les entreprises et les riches, et aussi des manipulations financières du genre l’achat de la dette US… Mais au fonds, la raison profonde, c’est l’effondrement de la base productive : moins d’industrie, moins de recettes, moins de croissance réelle, moins de salaires pour consommer, moins de cotisations pour la SECU et les retraites…
Et cette désindustrialsiation n’était pas une fatalité dans la concurrence mondiale, mais un choix d’une classe sociale qui se contrefout de la situation de la France et de ses citoyens.
Et on veut nous faire croire que c’est le patronat qui pourrait réindustrialiser aujourd’hui ? Mais le patronat français n’est plus capable d’innover, d’industrialiser, de développer ! Il est devenu rentier, dépendant des subventions publiques, des exonérations fiscales, des aides en tout genre. Et ces milliards que malgré la crise, le monde du travail produit chaque année, il ne sait plus quoi en faire, car il ne connaît que la finance, les montages financiers, et qu’il est obsédé par ses dividendes et la vie de seigneurs des ultra-riches. Il ne sait plus industrialiser. Et c’est ça le fond du problème.
Les Bernard Arnault et autres milliardaires ne sont plus des capitaines d’industrie, mais des sangsues qui pompent la richesse collective sans rien créer pour la société. Ils ne savent plus mettre les mains dans le cambouis. Leur horizon se limite à la rentabilité immédiate, pas à la construction d’un avenir industriel.
4. Qui peut remplacer le patronat ?
Non, la vraie question, ce n’est pas qui on met à la place de Macron. qui que ce soit, c’est de trouver comment remplacer les patrons pour gagner la réindustrialisation. Il faut que le monde du travail s’organise. il faut une mobilisation massive du monde du travail pour prendre en main les enjeux industriels, les besoins de formation, d’investissements. Tous ceux qui veulent créer, innover, produire, sont les bienvenus à condition qu’ils placent le travail et les savoir-faire au cœur et qu’ils acceptent de mettre leurs profits au second plan.
Malheureusement, les partis de gauche, enfermés dans l’électoralisme et les batailles médiatiques, ne sont pas organisés pour ça. Ils ont oublié l’éducation populaire, la formation, l’organisation concrète, et ne sont pas capables aujourd’hui de mobiliser les forces productives pour la réindustrialisation. Fabien Roussel tente de réorienter le parti communiste sur le travail et l’industrie. Mais certains font la fine bouche, comme si l’industrie était quelque chose de mal.
Ils ne savent le plus souvent rien de ce qui serait nécessaire pour une vraie réindustrialisation, rien de ce qui serait nécessaire pour un changement radical économique et social qui permette de mobiliser des millions de travailleurs pour développer à grande échelle le rail, ouvrir des dizaines de nouvelles lignes de fret, lignes de passagers, des métros, des trams, innover avec de la mobilité à la demande en zone dense, les véhicules autonomes, et pour cela, il faut de l’acier, de la métallurgie, de la mécanique, de l’électrotechnique, de la chimie…
Et il faut transformer radicalement l’agriculture addicte aux subventions européennes qui ne favorisent que la financiarisation des gros, et sortir de l’idéalisme d’une agriculture paysanne artisanale et individuelle pour réinventer une socialisation massive de l’agriculture, des sovkhozes modernes avec tout ce que l’agronomie scientifique peut apporter à la compréhension de la biodiversité, d’une agriculture qui produise un sol plus riche.
Et il faut une révolution culturelle pour faire du numérique un outil au service de l’éducation populaire, de la citoyenneté, de la culture pour tous, et le sortir des rapaces de la publicité, de la marchandisation cachée derrière la gratuité… si c’est gratuit, c’est toi le produit, comme on dit.
5. Une révolution culturelle et industrielle
Ces révolutions technologiques, industrielles, agricoles, culturelles, demandent un changement radical des élites qui dirigent les institutions et les médias.
- Former une nouvelle génération d’ingénieurs techniciens et ouvriers capables de reconstruire une industrie souveraine.
- Socialiser les moyens de production en inventant une nouvelle génération de gestionnaires, financiers et organisateurs qui ne servent que l’intérêt général, pas la rentabilité privée.
- Démocratiser la technologie pour qu’elle serve l’éducation, la culture, la citoyenneté.
C’est le défi que les communistes doivent proposer à la jeunesse, celle des lycées techniques et des grandes écoles, celle des CAP et des masters 2, celle des banlieues, des bourgs et des centre-villes… Cette génération doit tout bousculer !
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